Les scénarios se ressemblent, et pour certains pays, se répètent. Cela n’a pas empêché plusieurs pays Africains dont les élections se sont déroulées en 2020 de se montrer d’un civisme et d’un chic sans pareil. Le Journal de l’Afrique vous présente un check-up des élections africaines de 2020.
Les Comores : législatives, 2 tours, 19 janvier – 23 février 2020
Depuis le retour au pouvoir du président Azali Assoumani en 2016, les Comores ont connu beaucoup de turbulences. Des manifestations, des actes répressifs, un référendum constitutionnel typiquement africain pour contourner la limite des mandats présidentiels, la suspension de la cour constitutionnelle …
Trois semaines avant le premier tour des législatives, le président use de ses pouvoirs fraichement acquis afin de lever l’immunité des députés de l’opposition et les faire arrêter. Afin de contester les actions du président, les partis de l’opposition ont boycotté les élections. Au bout du premier tour, le parti du président (CRC) a remporté 16 sièges, à la fin du second, 4 sièges supplémentaires, si on y additionne les 9 sièges élus indirectement, le CRC détient 29 sièges des 33 prévus au parlement.
Cameroun : législatives, 9 février, élections partielles exceptionnelles le 22 mars 2020
Le parti du président remporte 152 sièges sur 180. Le pays est sous tension à cause des attaques de l’organisation terroriste Boko Haram au nord, et il est impossible de tenir les élections à l’ouest à cause du conflit armé de l’Etat avec les séparatistes
Togo : présidentielle, 22 février , finie au premier tour 2020
La révision constitutionnelle de 2019 dans le rétroviseur, le Togo s’est prêté à une campagne électorale relativement tranquille. Le président Faure Gnassingbé (UNIR) a gagné l’élection dès le premier tour avec 70% des suffrages. La crise postélectorale a été moins sanguinaire que les précédentes. D’ailleurs, il est à signaler que cette crise électorale a surtout été causée par l’annonce de la victoire prématurée du candidat principal de l’opposition Agbéyomé Kodjo
Mali : législatives, 2 tours, 29 mars – 19 avril 2020
Le contexte malien fait que la tenue des élections, leurs déroulements et leurs résultats soient très peu représentatifs de ce qu’un scrutin national devrait exhiber. Tout d’abord, le taux de participation a plafonné à 35% des inscrits . Ensuite, quelques jours avant le premier tour des élections, Soumaïla
Cissé, leader du troisième parti du Mali (URD), a été enlevé par le GSIM . Comme si ce n’était pas suffisant, le jour même du premier tour, des présidents de bureaux de votes ont été enlevés parmi d’autres actes de violences anti-élection menés par le GSIM et ses Katiba.
Quoi qu’il en soit, plus tard dans l’année, suite à un putsch militaire des officiers du Soundiata-Keïta, le président Keïta a démissionné , le parlement et le gouvernement ont été dissolus et l’Etat est actuellement sous le contrôle du conseil de transition (militaire évidemment) avec Bah n’Daw à la tête de l’exécutif.
Burundi : présidentielle finie au premier tour et législatives, 20 mai 2020
La République du Burundi, en quelques mots, n’est pas un Etat de droit. La puissance publique a été d’ailleurs un simple instrument de mise en examen, torture, condamnation et exil des opposants au pouvoir du Conseil militaire (CNDD-FDD ).
Au niveau des chiffres, le turnout de ces triple-élections était suspicieusement élevé (88% de participation). Le nouveau visage du parti au pouvoir, l’évangéliste Evariste Ndayishimiye a été élu président dès le premier tour à 71% des voix. Les députés du même parti (CNDD-FDD) dominent l’Assemblée nationale avec 86 sièges, soit 71% de représentation au parlement. C’est assez raisonnable…
Malawi : présidentielle anticipée finie au premier tour, 23 juin 2020
Suite à plusieurs infractions électorales durant les précédentes (régulières) élections de 2019, la Cour constitutionnelle a ordonné la réorganisation du scrutin . Lors des nouvelles élections, le candidat du Parti du congrès du Malawi (MCP) remporte la victoire dès le premier tour avec 59% des votes
Guinée : présidentielle finie au premier tour, 18 octobre 2020
Le candidat RPG (sans mauvais jeux de mots) et président sortant Alpha Condé a remporté ce scrutin très critiqué avec plus de 59% des votes dès le premier tour. La campagne électorale des deux principaux candidats Alpha Condé et Cellou Dalein Diallo a été menée dans le calme et avec une relative élégance.
Cependant, dans l’attente des résultats du scrutin, une longue attente médiée par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et les instances internationales de part et d’autre des deux parties de la course à la présidence, la tension est montée progressivement chez le camp de l’opposition.
Cellou Dalein Diallo (UFDG) a annoncé précocement sa victoire en s’appuyant sur un décompte réalisé par ses militants dans les bureaux de vote . Ce qui, à la lumière des résultats provisoires, a causé le chaos dans les fiefs de l’UFDG. Cela n’empêche que l’élection de 2020 reste la plus calme de l’histoire de la Guinée.
Seychelles : présidentielle finie au premier tour et législatives, du 22 au 24 octobre 2020
Les deux élections ont abouti à des choix similaires de la part des votants. Le président sortant Danny Faure (Lepep) a obtenu 43% des voix, et son parti a remporté 10 des 35 sièges du parlement. Le nouveau président, Wavel Ramkalawan, a obtenu 55% des voix et les députés de son parti (LDS) 25 sièges à l’Assemblée Nationale.
L’essor de la présidentielle seychelloise marque la première alternance politique dans l’histoire du pays. C’est aussi globalement l’un des rares pays africains qui ne souffre pas de crises politiques. D’ailleurs, le président sortant s’est montré gracieux et a félicité l’opposition pour sa victoire.
Tanzanie : présidentielle et législatives simultanées, 28 octobre 2020
Le seul événement notable de ces élections est le départ du président Jakaya Kikwete, remplacé par son ministre de l’infrastructure et membre de son parti. Le nouveau président, John Magufuli, alias le bulldozer , jouit d’un bon capital politique dans l’Etat-parti (CCM) ainsi qu’auprès du peuple, il a remporté les élections avec 84% des suffrages.
Quant aux législatives, le CCM a remporté 252 sièges sur 376, l’écart aurait été plus grand encore si le quota des députés élus par la méthode Hondt (soit 110 sièges) n’était pas aussi large. On notera la faible participation aux élections, sans doute causée par la phobie de la Covid-19.
Côte d’ivoire : présidentielle, 31 octobre 2020
Avec une affluence de 54% le jour de la présidentielle ainsi que le boycott de l’opposition, le président Alassane Ouattara n’a eu aucun mal à remporter les élections avec 95% des suffrages.
Le scrutin ivoirien était ponctué par une vague d’arrestations d’opposants, ainsi que l’interdiction des manifestations durant tout le mois d’octobre précédant les élections. Un mandat d’arrêt a été émis contre le candidat principal de la présidentielle de l’opposition, Guillaume Soro.
Des élections législatives étaient aussi prévues pour la même période, mais elles ont été reportées pour mars 2021.
Burkina Faso : présidentielle et législatives simultanées, 22 novembre 2020
En dépit d’une participation de 50% causée essentiellement par les problèmes sécuritaires à l’est du pays , les élections se sont déroulées dans les normes. Le président Roch Marc Christian Kaboré (MPP) est réélu dès le premier tour avec presque 58% des votes. Son parti obtient 56 sièges parlementaires, soit le même nombre de sièges qu’aux dernières législatives.
Ghana : présidentielle et législatives simultanées, 7 décembre 2020
Un autre changement à la tête de l’Etat au cours de ces élections exemplaires, les principaux candidats ayant convenu publiquement et au préalable de ne rien faire afin de mettre en danger la stabilité du pays . Nana Akufo-Addo (NPP) s’est fait élire avec 51% des voix dès le premier tour de la présidentielle. Le président sortant (John Mahama – NDC) a reconnu la victoire du nouveau chef d’Etat du Ghana sans accroc.
En ce qui concerne le parlement, le résultat relève du rarement vu, voire du jamais vu en Afrique. Le Parlement du Ghana est sans majorité, 50-50 comme on dit. Le NPP et le NDC se partagent le législatif d’un pays africain dont les politiciens ont su se montrer démocratiques. Ils n’en demeurent économiquement sans bilan, dans le cas du président sortant.