Après avoir supprimé des pages et des comptes, Facebook a été accusé par Yoweri Museveni d’ingérence dans l’élection présidentielle. En représailles, le président ougandais a interdit l’accès aux réseaux sociaux.
Deux poids, deux mesures. En septembre dernier, des chercheurs de Stanford dévoilaient au grand jour un réseau de pages Facebook liées au parti du président Alpha Condé, parmi lesquelles des pages de médias à la solde du gouvernement. Le réseau social américain avait alors eu une réponse mesurée, décidant simplement d’indiquer aux utilisateurs par qui étaient financées les publicités politiques en Guinée.
Quatre mois plus tard, à un peu moins de 5 000 kilomètres de là, Facebook fermait « un réseau de comptes et de pages en Ouganda qui étaient impliqués dans un ‘comportement inauthentique coordonné’ visant à influer sur le débat public en amont de l’élection », selon les termes du groupe de Menlo Park. Parmi les comptes supprimés, celui de Don Wanyama, conseiller en communication du président Yoweri Museveni.
Facebook n’a pas apprécié cette opération qui, selon l’entreprise, visait à faire paraître le président « plus populaire qu’il ne l’était ». La fermeture des pages et comptes a été décidée de façon unilatérale, « sans que l’on soit invité à répondre à ces allégations », résume le porte-parole du gouvernement Ofwono Opondo qui accuse le réseau social d’ « autoritarisme » et de parti pris pour l’opposition.
Mais qu’est-ce qui explique une telle clémence pour Alpha Condé quand Museveni est directement sanctionné par l’entreprise américaine ? Facebook semble ne pas avoir digéré le blocage des réseaux sociaux en Ouganda lors du scrutin de 2016. Mais son intervention est surtout très éloignée du discours de Georgetown de Mark Zuckerberg, qui affirmait : « même si nous voulions interdire les publicités politiques, la manière de fixer une limite en la matière reste incertaine ».
Le PDG du groupe américain assurait même qu’il n’était pas de son rôle de « vérifier les informations diffusées dans les publicités politiques » diffusées sur Facebook, ajoutant que « si le contenu posté a une valeur informative, nous ne le supprimerons pas, même s’il entre en contradiction avec nos règles de modération ». Et le fondateur de Facebook de poursuivre : « Dans une démocratie, je pense que c’est aux gens de décider ce qui est crédible, pas aux géants numériques ».
La décision de Facebook étonne, donc. Face à cette manœuvre, l’Ouganda a accusé les Etats-Unis d’ingérence dans l’élection présidentielle. Une ingérence qui n’a pas été du goût du président Musevini qui, en représaille contre le groupe américain, a décidé de couper les accès aux réseaux sociaux avant, mais également après le scrutin.
Le gouvernement de Kampala déplore par ailleurs que l’Ambassadrice américaine, Natalie E. Brown, ait tenu à rendre visite au leader de l’opposition Bobi Wine après le vote. « Ce qu’elle a essayé de faire de manière flagrante, c’est de s’immiscer dans la politique interne de l’Ouganda, en particulier les élections, pour contourner nos élections et la volonté du peuple », a affirmé le porte-parole du gouvernement Ofwono Opondo.
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