Juan Branco, l’avocat français d’Ousmane Sonko, affirme avoir été expulsé et interdit de participer au procès de l’opposant sénégalais. Qui est cet avocat, habitué à défrayer la chronique ?
Il n’a pas seulement choisi un avocat. Juan Branco est bien plus que cela. Avocat de l’opposant sénégalais Ousmane Sonko, Branco affirme dans un tweet avoir été arrêté à son arrivée à Dakar. « Faire arrêter un avocat par sept hommes en armes, le détenir, l’intimider puis le faire expulser, pour l’empêcher de défendre un homme. Quel hommage du vice à la vertu », écrit un peu plus tard l’avocat de l’opposant sénégalais.
Selon Pressafrik, Juan Branco aurait donc été expulsé du Sénégal dès son atterrissage à l’aéroport Blaise Diagne de Diass, alors que reprenait ce jeudi son procès pour diffamation, après la plainte du ministre du Tourisme. Cette expulsion tombe quelques heures après l’annonce par Sonko de la suspension d’un de ses avocats, Ousseynou Fall, du barreau de l’ordre des avocats.
Un avocat anti-système… ou presque
Si Sonko s’est adjugé les services de Juan Branco, ce n’est pas pour sa propension à gagner les procès. Branco, plus qu’un avocat, est avant tout une arme médiatique puissante. Sa notoriété, il la doit d’ailleurs à son succès loin des médias : il avait sorti un brûlot contre le président français qui, sans promotion médiatique, a été téléchargé plus de 100 000 fois sur internet. Dans les librairies, il a été vendu à plusieurs dizaines de milliers d’exemplaires.
Outre ce fait d’arme, Juan Branco est devenu la vitrine de plusieurs affaires. La plus connue est l’affaire WikiLeaks. Il a été l’un des avocats de l’équipe de défense de Julian Assange. Il a également été l’avocat de Jean-Luc Mélenchon, de certains Gilets jaunes ou encore de Tayeb Benabderrahmane, pour ce qui est de ses dossiers français.
L’Afrique, le fils du producteur de cinéma portugais Paulo Branco, connaît bien. Avec des coups d’éclat, dont lui seul a le secret. Alors qu’il est, en 2018, expert indépendant pour l’ONU chargé de mettre en œuvre les poursuites du procureur de la Cour pénale spéciale centrafricaine, il dénonce des actes perpétrés par les forces de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique (Minusca). Il dépose également un dossier à la CPI, accusant l’Union européenne de crimes contre l’humanité, notamment en Libye.
Experts de la mise en scène
En choisissant Juan Branco, Ousmane Sonko a frappé fort : il sait que son cas aura une portée internationale. Mais aussi que Branco est estampillé anti-système, un peu comme lui. Sauf que l’avocat n’est pas aussi rebelle qu’il le dit : il aurait intégré le cabinet d’Aurélie Filippetti, ex-ministre française, grâce à son père. Et sa stratégie est souvent décriée par ses opposants : « Dire qu’il a été censuré par les médias est la meilleure stratégie pour quelqu’un comme lui, qui se place comme un adversaire du système », résume ainsi Gaspard Gantzer, un politique français qui l’a côtoyé à plusieurs reprises.
Mais c’est justement ce côté anti-système, ses mises en scène et sa façon de crier au complot à tout-va qui ont dû plaire à l’équipe d’Ousmane Sonko. Tout l’entourage de l’opposant sénégalais le sait : Branco ne fera certainement pas avancer le dossier judiciaire de Sonko. Mais il sera un atout de taille pour le poser en victime de Macky Sall. « Ce sont deux bêtes médiatiques, qui ont acquis l’art de bien communiquer. Sonko et Branco se sont bien trouvés », résume tout simplement un avocat français.