Le leader du parti français La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon, est depuis dimanche en visite au Burkina Faso. Entre hommages et réunions, que fait le député français à Ouagadougou ?
C’est une visite hautement médiatisée qu’a débutée le député français Jean-Luc Mélenchon au Burkina Faso dimanche dernier. Les étapes de cette tournée ressemblent à s’y méprendre à celles d’Emmanuel Macron, qui s’était rendu à Ouagadougou en 2017. Et à chaque étape de son voyage burkinabè, le meilleur ennemi du président français a tenu un discours qui tranche avec celui d’Emmanuel Macron. Et à l’applaudimètre, le leader de l’extrême gauche française a un peu d’avance sur le président français : la popularité de Mélenchon semble être importante à Ouagadougou.
Quel était l’objectif de ce voyage ? Le chef de file de La France insoumise (LFI) ne s’en cache pas : arrivé en quatrième position lors de la dernière élection présidentielle française, il compte rempiler en 2022. Et comme en 2017, la droite et l’extrême droite françaises seront favorites du scrutin. Dans une France très influente en Afrique, Mélenchon représente, à première vue, la voix la moins néo-colonialiste. Le fondateur de LFI a également un regard empreint de démocratie sur le continent : lors de la présidentielle togolaise de 2020, il avait dézingué le régime Faure Gnassingbé. Il a également fustigé Alpha Condé, alors candidat à un troisième mandat en Guinée.
.@rochkaborepf a reçu en audience ce lundi 19 juillet à Kosyam, @JLMelenchon député français et président du groupe parlementaire @FranceInsoumise #BurkinaFaso pic.twitter.com/2IaiTAGuWl
— Présidence du Faso (@presidencebf) July 19, 2021
Contre Macron et l’impérialisme français
La tournée au Burkina Faso de Jean-Luc Mélenchon reste cependant hautement symbolique. Ce n’est pas à Ouagadougou en effet que l’ex-socialiste remportera des voix pour la prochaine présidentielle. Mais en rendant hommage à Thomas Sankara, pendant une visite du mémorial du héros burkinabè, Mélenchon a planté le décor : s’il est élu président, sa politique sera moins impérialiste que l’est celle d’Emmanuel Macron. « Je peux à la fois vous dire que je représente cette France qui ne s’identifie pas à l’impérialisme, qui n’a pas envie de colonialisme, qui déplore le paternalisme et qui hait l’injustice d’un crime non puni », a simplement déclaré le leader de LFI.
Jean-Luc Mélenchon a poursuivi sa tournée avec une rencontre avec le président de l’Assemblée nationale, Alassane Sakandé. Les deux hommes ont discuté la situation sécuritaire au Burkina Faso. Dans un discours, Mélenchon a insisté sur une question : « Qui finance les terroristes ? », une interrogation centrale pour le député. Le député français avait d’ailleurs déjà questionné Paris sur son soutien militaire à Faure Gnassingbé. Le même jour, Jean-Luc Mélenchon a été reçu par le président Kaboré, avec qui il a discuté la crise sanitaire, entre autres. Une occasion de critiquer, certainement, la politique française en Afrique. En 2019, alors que Jean-Yves Le Drian avait demandé plus d’action de la part du Burkina contre le terrorisme, le ministre de la Sûreté intérieur, Simon Compaoré, avait répondu : « Les propos du ministre Jean Yves Le Drian ne me concernent pas. (…) Nous sommes les maîtres de nos destins ».
C’était certainement l’objectif de Jean-Luc Mélenchon : montrer au Burkina Faso, et à l’Afrique en général, son aversion pour l’impérialisme français. Lors de son voyage, l’opposant de gauche s’est entretenu avec des acteurs majeurs de la société civile, à savoir la patronne de l’association Yelemani et sa fondatrice Blandine Sankara, sœur de Thomas. Puis il a rendu visite à l’artiste engagé Smarty, très influent en Afrique subsaharienne et appartenant à un collectif de chanteurs engagés. Smarty est en l’occurrence proche des sénégalais Didier Awadi et Simon Kouka. Aujourd’hui, Mélenchon conclura sa longue visite par une conférence à l’université de Ouagadougou.
On ne peut deviner son discours, mais il sera sans doute aussi flamboyant que d’habitude. Nul doute que Jean-Luc Mélenchon redira ses ambitions en termes de politique africaine. Forcément, Emmanuel Macron en prendra pour son grade, pour le grand plaisir de ses auditeurs. Le leader de l’extrême gauche tentera aussi de montrer qu’il est l’alternative la plus crédible au président de la République, mais surtout à Marine Le Pen. La prêtresse de l’extrême droite française, favorite de la présidentielle, avait réussi en 2017 à attirer les votes des Africains de France en demandant que la France arrête d’infantiliser l’Afrique et ses dirigeants en s’immisçant dans leurs affaires. La patronne du Rassemblement national avait également appelé à la fin du franc CFA, une monnaie selon elle colonialiste.
🇧🇫 Avec @MathildePanot et @LachaudB, nous avons rencontré à Loumbila, les membres de l'association @AYelemani pour la souveraineté alimentaire du #BurkinaFaso, et sa fondatrice Blandine Sankara.
➡️ +d'infos sur cette visite d'échanges et d'apprentissage : https://t.co/IdXHCLU4cG pic.twitter.com/ABToJmU9Ey
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) July 20, 2021