Le Camerounais Issa Hayatou, ex-président de la CAF, a été exclu de toute fonction en rapport avec le football pendant un an, cinq ans après avoir signé un contrat avec Lagardère Sports.
30 000 francs suisses et un an de suspension de toute fonction relative au football. Quatre ans après son départ du poste de président de la Confédération africaine de football (CAF), Issa Hayatou a été sanctionné par la chambre de jugement de la Commission d’éthique de la FIFA. Le Camerounais a dirigé l’instance africaine de football pendant vingt-neuf ans, avant d’être battu par le Malgache Ahmad Ahmad en 2017. Hayatou avait également été, entre 1990 et 2008, membre du comité exécutif de la FIFA. Il avait présidé l’instance internationale par intérim d’octobre 2015 à février 2016 après la suspension de Sepp Blatter. Depuis janvier, Hayatou était président d’honneur de la CAF.
Ce qui est reproché au dirigeant camerounais, c’est la gestion du contrat conclu en septembre 2016 avec Lagardère Sports, pour les droits télévisés et marketing du football africain. Le fameux contrat prévoyait la gestion des droits du foot africain par Lagardère Sports entre 2017 à 2028, pour un montant estimé à 1 milliard de dollars. La CAF avait résilié unilatéralement le contrat à la fin de l’année 2019, estimant que l’entreprise avait « enfreint les règles de la concurrence ». S’en était suivi une bataille judiciaire. Lagardère avait réclamé devant la Chambre de commerce internationale (ICC) de Genève l’annulation de la résiliation du contrat. Mais la justice avait fini par confirmer la décision de la CAF.
Un contrat qui fait polémique
Après les accusations contre Lagardère Sports concernant les règles de la concurrence, c’est Issa Hayatou qui subit désormais les conséquences de ce contrat. La FIFA a estimé que le Camerounais s’était rendu coupable d’une infraction à l’article 15 du Code d’éthique de la fédération internationale, qui demande aux dirigeants du football de « faire preuve d’une absolue loyauté vis-à-vis de la FIFA, des confédérations, des fédérations, des ligues et des clubs ». En ne lançant pas d’appel d’offres, Hayatou s’est rendu coupable, selon la FIFA, de non-respect des principes de concurrence.
Il est notamment reproché au dirigeant camerounais d’avoir privilégié Lagardère Sports alors qu’un autre groupe, Presentation Sport, avait soumis une offre estimée à 1,2 milliard de dollars, soit 200 millions de dollars de plus que Lagardère. L’ex-président de la CAF aurait pris la décision de confier les droits à son partenaire historique sans en tenir informés les autres membres du comité exécutif de la CAF. La FIFA évoque des « répercussions désastreuses pour la CAF, à la fois d’un point de vue financier et de son image ».
Mais ce manque à gagner de 200 millions de dollars sur onze ans est-il vraiment la cause des problèmes actuels de la CAF ? Partenaire historique de la CAF, Lagardère connaissait le football africain, et l’arrivée d’un nouveau partenaire — on l’a vu avec l’échec de Mediapro en France et ses conséquences économiques — n’aurait pas forcément été de bon augure. La CAF sait en effet que Lagardère Sports maîtrise son sujet : ce n’est pas pour rien que l’instance dirigeante du football africain a attendu la fin de la CAN 2019 pour résilier unilatéralement le contrat.
Et maintenant, quel diffuseur pour la CAN ?
A l’époque, les instances dirigeants de la CAF, dont le président Ahmad Ahmad, pensaient trouver un plan B très rapidement. Il fut un temps question de donner les droits à Infront Sport & Medias, la filiale suisse du groupe chinois Wanda Group. Mais en 2021, aucun diffuseur privé n’a les ambitions de Lagardère Sports. D’autant que le coronavirus et la crise économique sont passés par là. Alors que la CAF espérait revendre les droits de ses compétitions au moins 1,5 fois le prix proposé par Lagardère Sports, l’instance fait aujourd’hui chou blanc. Un manque à gagner pour les pays africains.
Le monde du football africain attend désormais un appel d’offres. Il interviendra très certainement après la prochaine Coupe d’Afrique des Nations qui aura lieu au Cameroun — dont Hayatou présidait le comité organisateur — en janvier prochain. La CAF espère voir des acteurs de l’audiovisuel chinois, du Golfe ou américains y participer. Facebook et Amazon seront-ils également de la partie ? Aucun de ces groupes n’a d’expérience dans la couverture des compétitions africaines. Quant aux sommes à débourser, après la pandémie, elles risquent de ne pas être celles espérées par la CAF qui n’est, dans ce dossier, pas en position de force.