Le pétrolier américain Exxon Mobil s’est retiré du bloc Deepwater Cape Three Points, au Ghana. Le gouvernement, qui comptait sur ce site pétrolier, va devoir revoir sa copie.
A Accra, la tension monte. Les discussions politiques tournent désormais autour d’un sujet unique : le départ d’Exxon Mobil du pays. Voilà deux ans que le Ghana a signé un accord d’exploration et de production avec le géant pétrolier américain. Mais ce dernier a fini par jeter l’éponge. Exxon détenait 80 % des participations dans Deepwater Cape Three Points (DCTP), tandis que les 20 % restants étaient détenus par la société d’Etat Ghana National Petroleum Corp. et Ghana Oil Co. Une décisions étonnante lorsque l’on sait comment le pétrolier a négocié à de multiples reprises pour entrer au capital du bloc en eaux très profondes. La zone en question étant dangereuse, le gouvernement ghanéen avait négocié un accord d’exploration et d’exploitation du site avec Exxon, qui s’était engagé en 2018 à finaliser rapidement la phase initiale d’exploration.
Dans une lettre envoyée par l’opérateur à l’exécutif ghanéen, les dirigeants d’Exxon affirment avoir bouclé cette phase initiale, qui sera finalement la dernière du groupe en tant que partenaire du DCTP, sachant qu’aucun puit n’aurait été foré.
Mais que s’est-il passé pour que le groupe américain plie bagage trois ans après la signature d’un accord ? Le parlement ghanéen accuse le pouvoir d’Akufo-Addo d’être responsable de ce départ précipité. Toutes les conditions n’auraient pas été réunies pour mettre à l’aise Exxon et l’accord aurait été trop peu compétitif, selon les élus qui demandent des comptes.
Une capacité de production surévaluée ?
Le Ghana est désormais confronté à un souci de taille : le manque à gagner pour les caisses du pays, si le forage prend du retard, risque de se faire ressentir, car le pays espérait sortir 500 000 barils par jours à compter de 2024. Mais le départ d’Exxon pose la question de la réalité des chiffres. Alors que le Ghana, par l’intermédiaire de son ministre des Finances, Ken Ofori-Atta, misait sur le DCTP pour augmenter son budget dès 2021, les rumeurs concernant un potentiel pétrolier plus faible que prévu dans la zone exploitée par Exxon Mobil courent de plus en plus. Selon plusieurs sources proches du pétrolier américain, le Deepwater Cape Three Points aurait révélé, après étude, une capacité de production de 500 millions de barils. Trop faible pour l’opérateur qui a préféré partir avant de devoir investir des sommes trop importantes dans un projet qui s’annonce finalement peu rentable.
Mais pour les parlementaires, c’est l’occasion d’égratigner le régime en place. Selon le député John Abdulai Jinapor, membre de la Commission de l’énergie, « le retrait d’Exxon Mobil est un énorme revers. C’est l’une des plus grandes compagnies pétrolières du monde et si elle quitte votre pays, cela n’envoie certainement pas un très bon signal ». En effet, le ministre Ken Ofori-Atta avait promis une série d’investissements étrangers après la fin de la phase initiale. Retour à la case départ, donc, pour Accra qui va devoir chercher un nouvel opérateur. Mais étant donné la dangerosité de l’exploration en hauts très profondes, pas sûr que le Ghana trouve un remplaçant à Exxon de sitôt.