Une moitié des bébés naissant au CHU de Brazzaville pèsent moins de 2,5 kilogrammes. Le paludisme, l’hypertension, la pauvreté et l’âge de la mère expliquent entre autres ce problème.
Une étude réalisée entre le 1er janvier et le 30 juin 2020 au Centre hospitalier universitaire (CHU) de Brazzaville au Congo, révèle que sur l’ensemble des naissances enregistrées dans cet hôpital, 45,6% sont des naissances de faible poids, c’est-à-dire avec un poids inférieur à 2500 grammes selon les critères de l’OMS.
Selon les résultats qui ont été publiés en juin2022 dans la revue American Journal of Pediatrics, plusieurs facteurs expliquent ce taux élevé de naissances de petit poids au CHU de Brazzaville.
Il s’agit des facteurs socio- démographiques comme l’âge de la mère, le niveau d’instruction, le statut matrimonial, le lieu de résidence (ville où campagne) ; les facteurs socio- économiques (niveau de revenu de la mère), tout comme le suivi de la grossesse (alimentation et visites prénatales) et même les conditions de l’accouchement.
L’étude indique également que le paludisme et l’hypertension artérielle sont également responsables de 64% de cas de naissances de bébés en dessous de 2500g.
« Il convient de relever que la présence de la malaria et surtout de l’hypertension artérielle chez la maman aggravent l’état de santé du fœtus et conduisent le plus souvent à une naissance de petit poids, car les échanges entre la mère et le placenta sont perturbés », explique à SciDev.Net Gauthier Buembo, médecin et enseignant-chercheur à l’université Marien Ngouabi de Brazzaville, auteur principal de cette étude.
La directrice de la santé de l’enfant au ministère de la Santé et de la population au Congo, Josiane Sabaye, abonde dans le même sens.
Elle rappelle que « lorsque la tension artérielle n’est pas stabilisée à temps, l’enfant nait avec un petit poids, car il n’a pas reçu les échanges nutritionnels qu’il faut à travers le placenta », soutient-elle.
Elle déplore aussi l’état nutritionnel des femmes enceintes qui « laisse à désirer ». Car, elles ont souvent une carence en acide folique en fer, précise-t-elle.
Facteurs
D’après le constat fait par les chercheurs, les plus jeunes mères, âgées entre 14 et 35 ans, sont celles qui accouchent le plus des bébés en dessous de 2500g, soit 86% de naissances contre 14% de naissances inférieures à 2500g pour les mères âgées entre 35 ans-43 ans.
A ce sujet, l’étude n’apporte pas d’explication et laisse encore le champ libre au débat scientifique.
Le statut matrimonial (69% des mères de bébés à faible poids sont célibataires), le niveau d’études (50,56% des mères ont un niveau secondaire) et le niveau de revenus (71,5% des mères ont de faibles revenus) sont également des facteurs étroitement liés aux naissances de faible poids au CHU de Brazzaville.
Au regard de cette étude, le portrait-robot de la mère d’un bébé de petit poids serait une mère entre 20 et 35 ans, amaigrie (avec un indice de charge corporelle inférieur à 18,5), célibataire, d’un niveau d’études secondaires, avec de « faibles moyens financiers ».
Contrôles prénataux
Pour inverser la tendance au Congo, l’étude préconise une réelle sensibilisation pour le changement de comportement des femmes en particulier et de la communauté en général.
Les chercheurs prônent aussi l’éducation sexuelle et le planning familial (avec la contraception, l’espacement et le contrôle des naissances).
Le personnel de santé devrait en même temps mettre un accent sur la qualité des contrôles prénataux, l’identification des risques et le traitement des maux associés à la grossesse.
« L’État devrait aussi amplifier la lutte contre la pauvreté en augmentant l’aide destinée aux plus pauvres », ajoute Gauthier Buembo.
Au ministère de la Santé, Josiane Sabaye souligne que des efforts sont faits pour améliorer la santé de la mère et de l’enfant.
« Des formations sont soutenues et financées par des partenaires (OMS, UNICEF, FNUAP, ndlr) pour améliorer la santé prénatale (…) pour un suivi de qualité », déclare-t-elle, en précisant que l’OMS recommande désormais huit contacts prénataux avant l’accouchement.
Pour faire face à ce phénomène, elle soutient que le ministère de la Santé a commencé « l’amélioration des soins à la naissance avec la méthode kangourou (qui consiste à mettre le nourrisson peau contre peau avec son parent ndlr) que nous allons bientôt vulgariser dans les centres de santé pour bien prendre en charge ces enfants-là ».
Pour Cyriaque Djiodo, pédiatre à Pointe-Noire, les autorités devraient prendre en compte cette étude. « Il serait profitable de la généraliser. On pourrait en faire une étude multi- centrique. On sélectionnerait ainsi des centres de santé représentatifs dans tout le pays. Ainsi, on aura une cartographie des facteurs et des déterminants (des nouveaux nés en faible poids, ndlr) », conclut-il.
Cet article a été publié sur la version française de SciDev.net et est reproduit avec leur autorisation.