Après plusieurs épisodes de détention depuis août 2019, l’homme d’affaires qui s’était présenté à la dernière présidentielle tunisienne, Nabil Karoui, a obtenu un accord pour sa libération contre une caution de 10 millions de dinars, qu’il n’a pas pu payer.
C’est un montant qui donne le tournis : 10 millions de dinars tunisiens, soit environ 3 millions d’euros. Voilà la somme que, depuis plusieurs jours, l’entourage de Nabil Karoui, homme d’affaires tunisien et candidat malheureux de la dernière présidentielle, tentait de réunir. Accusé de blanchiment d’argent et d’évasion fiscale, le businessman et philanthrope tunisien Nabil Karoui a obtenu, le 24 février de la part du juge d’instruction, un avis favorable à sa mise en liberté provisoire sous caution. Si le procureur adjoint Mohsen Dali a souligné que le dirigeant du parti Qalb Tounes devait « rester à la disposition des tribunaux tunisiens », l’entourage de l’homme d’affaires s’est surtout concentré sur l’obtention de la somme à verser en échange de sa libération.
Une somme record
Le montant est exorbitant. La dernière fois qu’une libération provisoire sous caution a été appliquée par la justice tunisienne, nous étions en 2013. La procédure est donc très rare… et coûteuse. Dans le cas de Karoui, des partisans et des amis auraient accepté de se cotiser afin de réunir le montant de sa libération. Mais à la date butoir du 10 mars 2021, personne ne s’est présenté pour régler la note.
Nabil Karoui attend son procès pour évasion fiscale à la suite d’une enquête qui remonte à 2017. Il avait été arrêté pour la première fois en août 2019. L’homme de 57 ans est un riche magnat des médias, qui a fondé la principale chaîne de télévision privée tunisienne, Nessma, en 2007.
Après le business, la politique ! Nabil Karoui a fondé Qalb Tounes, un parti politique, en juin 2019. Candidat à la présidentielle de 2019 en Tunisie, il est arrivé deuxième au premier tour, alors qu’il était en prison. Une situation inédite. Mais un mois plus tard, il avait été largement battu au second tour du scrutin par l’actuel président Kaïs Saïed, et a finalement été à nouveau arrêté.
Une arrestation politique ?
Nabil Karoui a tenté de se présenter comme le candidat des plus démunis en Tunisie. Ces dernières années, malgré les affaires qui le visent, il a travaillé sur sa notoriété en participant à une émission télévisée caritative lors de laquelle il distribuait des appareils électroménagers aux familles nécessiteuses.
Les partisans de Qalb Tounes assurent que son arrestation est politique. Mais les opposants de l’homme d’affaires nuancent ces propos, affirmant que Karoui a utilisé sa fortune pour créer une chaîne de télévision et une organisation caritative à des fins politiques. Pour éviter toute polémique concernant la caution de Karoui, son entourage affirme avoir « fait le tour des banques pour rassembler le montant exorbitant de sa caution ».
Alors que la Tunisie est plongée dans une crise gouvernementale, judiciaire, politique, économique et sociale depuis de nombreuses années. Nabil Karoui tentera-t-il de retrouver une place sur l’échiquier politique ? Son parti avait obtenu 38 sièges au Parlement et constitue la coalition majoritaire aux côtés du mouvement d’obédience islamiste Ennahda. Une alliance de la carpe et du lapin.
Nabil Karoui pourrait être à nouveau arrêté dans les prochaines heures.