La jeune génération au Kenya, également appelée “génération Z”, a utilisé les réseaux sociaux pour mobiliser le pays, sans implication politique.
Des manifestations ont eu lieu dans le centre de Nairobi pour protester contre l’introduction de nouvelles taxes, alors que le Parlement continue de discuter du projet de loi de finances pour 2024-2025, le 20 juin 2024.
Des milliers de jeunes kényans ont protesté jeudi 20 juin dans tout le pays contre le projet de budget du gouvernement, actuellement en discussion au Parlement, qui prévoit la création de nouvelles taxes. Ils ont manifesté avec des sifflets et des smartphones en main.
Suite à une première manifestation de quelques centaines de personnes à Nairobi, la capitale kényane, la mobilisation de la jeunesse kényane s’est étendue dans tout le pays au cours d’un mouvement sans précédent lancé sur les médias sociaux il y a seulement une semaine. Ce mouvement se déroule en dehors de toute affiliation politique.
Surnommé « Occupy Parliament », ce mouvement a été créé pour s’opposer au projet du gouvernement de mettre en place une TVA de 16 % sur le pain et une taxe annuelle de 2,5 % sur les voitures particulières afin de financer le budget de 2024-2025. Les manifestants ont utilisé le hashtag #RejectFinanceBill2024 pour exprimer leur opposition à ces mesures.
En réponse aux nombreuses critiques, le gouvernement du président William Ruto a fait savoir mardi qu’il retirait la plupart des dispositions fiscales initialement prévues dans le projet de loi, qui doit être soumis au Parlement avant le 30 juin.
Des affrontements à Nairobi ont entraîné la mort d’un manifestant.
Cependant, les manifestants réclament le retrait complet du projet de loi. Jeudi, des groupes ont organisé des marches bruyantes avec des sifflets et des vuvuzelas dans les zones d’opposition à Mombasa (est) et Kisumu (ouest), à Eldoret (ouest), dans la vallée du Rift d’où vient le président, ainsi que dans les villes de Nanyuki (centre), Nakuru (centre), Nyeri (centre), et Kisii (sud-ouest).
Des milliers de personnes se sont rassemblées à Nairobi pour manifester, selon un journaliste de l’AFP. Des affrontements ont éclaté lors de la manifestation, et des pneus ainsi que du mobilier urbain ont été incendiés.
Selon plusieurs organisations, dont Amnesty International Kenya, 135 personnes ont été arrêtées dans tout le pays et au moins 200 ont été blessées à Nairobi lors des récentes manifestations. La Croix-Rouge kényane a également signalé sur les réseaux sociaux que huit personnes étaient dans un état grave.
Selon des sources concordantes, un rassemblement contre le projet de budget du gouvernement et les nouvelles taxes a dégénéré jeudi soir à Nairobi, entraînant la mort d’un manifestant. L’Agence indépendante de surveillance de la police (IPOA) a confirmé qu’une enquête était en cours pour éclaircir les circonstances de ce décès, après que des allégations ont été faites à propos d’un officier de police impliqué.
Notre objectif est de représenter les intérêts et les opinions du peuple.
Néanmoins, la tension était moins forte que lors des rassemblements anti-austérité organisés en 2023 par l’opposition, qui avaient entraîné de violents affrontements et des pillages. On ne dispose pas de données sur le nombre de personnes ayant participé aux manifestations au Kenya.
À Paris, les jeunes protestants ont bravé les autorités pendant des heures avec des chansons et des danses provocatrices malgré les tirs de gaz lacrymogène et de canons à eau de la police. Ils n’ont jamais relâché leurs téléphones pour prendre des selfies ou diffuser en direct sur les médias sociaux.
Margaret, une jeune femme de 23 ans diplômée et sans emploi, se décrit comme faisant partie de la “Génération Z” et estime que leur génération représente la voix du peuple. Elle dénonce le manque d’habitude du gouvernement à entendre cette voix. Elle remet également en question les taxes imposées, qu’elle juge incohérentes. Fatiguée des mensonges, elle exprime le désir que le gouvernement prenne conscience de leurs préoccupations.
Bella, une étudiante de 22 ans, ne fait pas confiance au gouvernement. Elle estime qu’ils essaient de la tromper en supprimant des taxes sur le pain et en les ajoutant ailleurs. Jack Ouma, un habitant de Kisumu âgé de 28 ans, exprime son mécontentement : “Nous sommes en train de mourir, nous ne pouvons pas nous permettre trois repas par jour. Qu’est-ce que le gouvernement nous apporte de bon ? Pourquoi devrions-nous le respecter ? Ruto devrait partir.”
Une décision finale est prévue pour le 27 juin.
En réponse aux récentes annonces, le gouvernement envisage désormais d’augmenter les taxes sur les carburants et les produits exportés. Cette mesure est vivement critiquée par l’opposition qui craint une hausse du coût de la vie, déjà impacté par les augmentations prévues en 2023 pour l’impôt sur le revenu et les cotisations santé, ainsi que par le doublement de la TVA sur l’essence.
Dans tout le pays, les manifestants attirent l’attention sur le président fervent évangéliste qui a été élu en août 2022 avec la promesse de défendre les plus démunis en le comparant à Zakayo, la figure biblique du collecteur d’impôts.
La session extraordinaire du Parlement a continué jeudi avec des débats sur le budget. Selon une source parlementaire, le vote final est actuellement prévu pour le 27 juin. Le gouvernement affirme que cette nouvelle augmentation d’impôts est nécessaire pour redonner au pays, qui est fortement endetté, un peu de marge de manœuvre financière.
D’après la Banque centrale du Kenya, l’une des économies les plus florissantes en Afrique de l’Est, le pays a connu une inflation de 5,1% en mai sur un an, principalement due à la hausse des prix des aliments et des carburants qui ont augmenté respectivement de 6,2% et 7,8%.