Après plus de 20 jours de manifestations contre la monarchie, le roi de l’Eswatini, Mswati III, a annoncé hier la nomination de Cleopas Dlamini en tant que nouveau Premier ministre.
C’est un nouveau Premier ministre qui prend place dans la hiérarchie de la dernière monarchie absolue d’Afrique. En Eswatini, un pays parfois plus connu sous le nom de Swaziland, le roi Mswati III est enfin apparu en public, après trois semaines de manifestations contre la monarchie. Une monarchie qui plie mais ne veut pas rompre : au bout d’un long discours énigmatique, le roi a fini par annoncer la nomination de Cleopas Dlamini, ancien patron des fonds de pension, en tant que Premier ministre.
Cette décision intervient huit mois après le décès du précédent Premier ministre, le prince Ambrose Mandvulo Dlamini. Le petit-neveu du roi et ancien chef du gouvernement était mort en décembre après avoir contracté la Covid-19. Une information qui n’a jamais été confirmée par le gouvernement ni par le trône. En attendant la désignation d’un nouveau chef du gouvernement, c’était le vice-Premier ministre Themba Masuku qui tenait la barre. Mais la gestion des crises sanitaire et économique a été catastrophique, allant jusqu’à provoquer la colère du peuple.
En Eswatini, traditionnellement, la famille royale tient par défaut les ministères régaliens, à savoir l’Intérieur, la Défense, les Finances et la Justice. Cinq membres de la famille de Mswati III sont d’ailleurs actuellement ministres. Néanmoins, sans Premier ministre, les affaires tournaient au ralenti dans le petit royaume enclavé entre le Mozambique et le territoire zoulou de l’Afrique du Sud.
NEW. Le roi Mswati III vient de nommer Cleopas Dlamini comme nouveau Premier ministre d'Eswatini lors du conseil populaire qui se tient aujourd'hui pour débattre des demandes démocratiques.
La première demande était de pouvoir élire le Premier ministre…https://t.co/psw1LIyGu1— Histoires Royales (@ActusRoyales) July 16, 2021
Un Premier ministre désigné et toujours pas élu
Les défis auxquels sont confrontés l’Eswatini et sa monarchie sont assez récents. Le pays a toujours dû faire face à une pauvreté extrême. Toutefois, son économie était sauvée par une planification agricole efficace et une décentralisation urbaine qui facilite le commerce. Sans compter, évidemment, sur le fait que le pays est doté d’une agriculture féconde, donnant quasiment à l’Eswatini son autosuffisant alimentaire.
Mais dernièrement, les choses ont empiré. Depuis deux décennies, le royaume d’Eswatini est dépendant à 90 % des importations d’Afrique du Sud. Les quelques entreprises internationales implantées dans le pays ne paient que de très faibles taxes. Et le secteur bancaire, très fort, fait office de paradis fiscal africain de choix, mais le royaume profite peu des fonds qui transitent sur son territoire. Pour toutes ces raisons, ainsi qu’une répression de l’opposition politique, les civils ont investi les rues par milliers, demandant pour la première fois de l’histoire du royaume la fin de la monarchie. La crise de la Covid-19, la corruption et la pauvreté ont amené le peuple à réclamer a minima des réformes.
En l’occurrence, l’élection directe du Premier ministre faisait partie des demandes de l’opposition. Après une répression violente des manifestations, qui ont fait une trentaine de morts civils, le roi est enfin sorti de son silence. Mswati III a simplement déclaré : « J’ai prié pour que Dieu me montre la voie. Et un homme qui ramènerait le pays à la normale et restaurerait l’économie s’est manifesté ». Ainsi donc, le roi a choisi un nouveau Dlamini pour prendre la place du dernier, sur conseils divins. Le peuple de l’Eswatini et les manifestants « sataniques », comme les qualifie le roi, devront donc se contenter de cette décision. Suffisante pour calmer la rue ?
Inside eSwatini | Pro-democracy Hosea MP Bacede Mabuza has a welcome message for incoming Prime Minister on his first day in parliament. pic.twitter.com/RLRBjhNt9t
— TheFieldNegro (@lentokozo) July 16, 2021