Le président égyptien a décidé de construire une nouvelle capitale, à 50 kilomètres du Caire. Une décision qui n’est pas une première en Afrique, où certains pays ont plusieurs fois changé de capitales.
Le projet aura coûté plus de 60 milliards de dollars. Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a décidé que l’Égypte allait se doter d’une nouvelle capitale. Sur le modèle de Dubaï, le maréchal rêve d’une ville impressionnante, qui sera située dans le désert, à quelques dizaines de kilomètres du Caire seulement. Alors que l’Égypte a du mal à jugule sa dette et que le pays connaît une inflation sans précédent, le choix de Sissi questionne autant qu’il inquiète. Surtout lorsque l’on sait qu’un Égyptien sur trois vit en-dessous du seuil de pauvreté et lorsqu’on connaît les moyens alloués à ce projet.
La nouvelle capitale égyptienne, un cache-misère ?
Mais su le papier, l’on comprend la décision du chef de l’État égyptien. Car Le Caire étouffe, avec ses 23 millions d’habitants, sa crise du logement et ses embouteillages quotidiens. Il s’agit aussi de détourner l’attention des investisseurs étrangers : si l’Égypte attire les fonds ou les investisseurs, Sissi préfèrerait que les étranges aient une image paradisiaque de son pays. En voulant se baser sur Dubaï, on imagine déjà ce que sera al-Masa : un endroit hyper sécurisé, réservé aux riches et qui ne reflètera en rien l’état réel du pays. Voire un cache-misère pour Sissi, qui s’attache aux apparences.
L’Égypte n’est pas le premier pays à penser à créer de toutes pièces une nouvelle capitale. Mais pour l’Indonésie, par exemple, qui a décidé de transférer sa capitale à plus de 1 500 kilomètres de Jakarta, la raison est autre. Nusantara sera la nouvelle cité importante du pays dès 2024, sur l’île de Bornéo. « Le transfert de la capitale permettra une meilleure distribution et plus d’équité », a annoncé le président qui craint les pics de pollutions et les catastrophes climatiques à Jakarta — 95% du nord de la ville pourrait être sous l’eau d’ici 2050. L’Indonésie veut donc se doter d’une « capitale verte », même si Jakarta restera la capitale économique du pays, au moins pendant les premières décennies.
Des décisions politiques, symboliques ou de rupture
Avant l’Indonésie et l’Égypte, plusieurs pays ont décidé d’un changement de capitale. En Afrique notamment. Au Nigeria, alors que, comme Jakarta, Lagos pourrait bien disparaître un jour à cause de l’érosion côtière, les autorités ont trouvé une solution de repli. Dès 1976, Abuja est officiellement devenue la capitale du Nigeria. Mais au-delà de l’aspect écologique, il s’agissait également de redonner de la neutralité à la capitale, alors que Lagos était à dominance Yoruba. Un choix basé sur l’ethnicité, donc. Il s’agit aussi parfois, pour un président, d’être en rupture avec le passé. Au moment des décolonisations, en 1957, la Mauritanie a par exemple décidé que sa capitale ne serait plus Saint-Louis mais Nouakchott.
Et puis, il y a le pouvoir symbolique de certaines villes, devenues des capitales politiques malgré le fait qu’elles n’en aient pas du tout la sociologie. En 1983, Yamoussoukro, lieu de naissance de Félix Houphouët-Boigny, le Père de la nation, est devenue la capitale politique et administrative de la Côte d’Ivoire. Un pays habitué à se choisir de nouvelles capitales : Grand-Bassam, Bingerville puis Abidjan ont successivement été les capitales du pays. C’est le sens de l’Histoire : Paris n’a pas toujours été une capitale, au Brésil on a également décidé de changer de capitale. Quant aux Pays-Bas, difficile de savoir qui de La Haye ou d’Amsterdam est la capitale du pays.