Un rapport consacré aux violences post-électorales de 2020 en Côte d’Ivoire impute la responsabilité des morts à Henri Konan Bédié. Ce dernier réfute ces accusations.
Ce n’est une surprise pour personne : quand Alassane Ouattara a réuni quarante officiers de police judiciaire pour enquêter sur les violences post-électorales de 2020, on s’attendait à ce que la responsabilité des événements soit imputée à l’opposition. Lundi dernier, le fameux rapport est finalement sorti. En tout, soixante pages qui reviennent sur les heurts qui ont précédé et suivi l’élection d’octobre 2020. En février dernier, les officiers en charge de l’enquête s’étaient déployés sur le terrain.
Et la conclusion de l’enquête est sans appel : en appelant à la « désobéissance civile », l’opposition, menée par Henri Konan Bédié, aura été un des déclencheurs des violences. De quoi expliquer les 85 morts officiels et les 500 blessés ? Les enquêteurs reprochent en tout cas au Sphinx de Daoukro d’avoir menacé la sécurité du pays en appelant au boycott du scrutin présidentiel, puis en annonçant la création d’un Conseil national de transition, aux côtés du candidat du FPI, Pascal Affi N’Guessan.
Une opération pour faire annuler l’élection
Dans le document livré lundi au pouvoir, le procureur Richard Adou estime que le peuple ivoirien a été « galvanisé par des discours d’appel à la haine », affirmant que la jeunesse a été « instrumentalisée par les leaders politiques », et plus particulièrement par HKB. Il s’agissait, estime-t-il, d’armer les jeunes Ivoiriens « pour faire échec à la tenue de l’élection et accentuer le climat de terreur ».
Konan Bédié et les membres du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA) doivent-ils craindre des représailles du régime ? Plusieurs d’entre eux avaient été arrêtés après les violences post-électorales. Mais le pouvoir Ouattara ne risque pas de s’arrêter là. Le rapport révèle en effet que ses investigations « ont démontré que les évènements survenus à l’occasion de l’élection présidentielle du 31 octobre 2020 ont été planifiés et financés essentiellement par des acteurs politiques et de la société civile ».
Parmi les bailleurs qui auraient financé ces opérations, Henri Konan Bédié est directement mis en cause. Tout comme sa garde rapprochée : son directeur de cabinet Narcisse N’Dri, des délégués ou des membres de la famille de HKB sont visés. Ils sont accusés d’avoir incité les populations « à bloquer les différentes voies d’accès à la ville de Daoukro ».
Des allégations que dément le clan HKB. En pleine réorganisation, le PDCI-RDA ne veut pas servir de fusible. Deux jours après la publication du fameux rapport, Henri Konan Bédié affirme que « le troisième mandat et ses ‘supporters’ sont les auteurs directs et indirects de la désobéissance civile, des exactions et violences qui ont suivi en octobre 2020 ». Autrement dit, c’est la décision de se présenter d’Alassane Ouattara qui aurait provoqué des violences.
Le PDCI ne craint pas la justice
Selon des documents qu’a pu consulter le Journal de l’Afrique, le PDCI a, en octobre dernier, enquêté sur des violences commises selon ces documents par des satellites du pouvoir en place. Depuis, le calme a été retrouvé à Abidjan et en Côte d’Ivoire, et un dialogue a débuté entre le PDCI-RDA et Alassane Ouattara.
Le PDCI « prend à témoin la communauté nationale et la communauté internationale sur sa disposition à aller à la table du dialogue véritable qui est susceptible d’effacer tous les germes de conflits », indique le parti qui affirme au contraire être à l’origine de l’apaisement de la situation. HKB assure ne pas avoir peur « de quelque procédure judiciaire que ce soit ». Mais le procureur Richard Adou risque bien d’engager des procédures contre le PDCI-RDA. Affaire à suivre.