Inégalement répartie sur Terre, l’eau douce est aussi souvent mal utilisée. Des procédés existent pour remédier à ces difficultés d’accès, offrant des résultats prometteurs, comme au Sénégal.
Ce mardi 22 mars 2022, poco x3 pro prix tunisie , qui marque le tout début du printemps, marque aussi la Journée mondiale de l’eau. Une journée qui nous donne l’occasion de nous intéresser à la disponibilité de cette ressource vitale un peu partout dans le monde.
L’eau de notre planète bleue est à 97,2 % salée ; on la trouve dans les océans, les mers, mais aussi dans certaines nappes souterraines. L’eau douce ne représente, elle, que 2,8 % de l’eau totale du globe. Les glaciers polaires en renferment 2,1 %.
Quant à l’eau douce accessible, elle ne correspond qu’à 0,7 % du total qu’il faut répartir entre l’agriculture, sa plus grande consommatrice (~70 % de l’eau prélevée), l’industrie (~20 %) et l’usage domestique (~10 %).
Non seulement l’eau douce est-elle géographiquement mal répartie sur Terre, mais elle aussi, et souvent, très mal utilisée.
Ce problème, sérieux dans nos pays tempérés, devient gravissime ailleurs, là où les moyens financiers et/ou technologiques font défaut : 11 % de la population mondiale n’a ainsi aucun accès à de l’eau potable et presque 30 % de cette population n’ont pas accès à l’eau potable salubre à leur domicile.
Processus ancestraux ou innovants de potabilisation
Transformer une eau initialement non potable en une eau potable est devenu un jeu d’enfant… ou presque. Des technologies – certaines inspirées de processus ancestraux (distillation, lit d’adsorbants…) et d’autres très innovantes – sont devenues monnaie courante, offrant une panoplie de solutions adaptables à quasiment toutes les situations.
Deux grandes familles de technologies peuvent être ici identifiées : celles basées sur la distillation, consommant donc de la chaleur ; celles utilisant des membranes et fonctionnant principalement grâce à l’énergie électrique. On parlera par exemple de « distillation multiflash », « distillation à compression de vapeur » pour la première famille ; d’« osmose inverse », « nanofiltration », « électrodialyse » pour la seconde.
L’inconvénient majeur de ces techniques c’est qu’elles sont très sophistiquées et nécessitent des investissements lourds, impossibles à assurer par des pays sans moyens financiers ou techniques importants, associés à des infrastructures de distribution robustes et bien ramifiées.
Est-il possible de proposer des solutions moins coûteuses dans ce domaine ?
L’exemple des eaux chargées en fluor
Le fluor est un oligoélément présent en très petite quantité (~2 grammes) dans le corps humain. En faibles doses, il s’avère très utile pour éviter les caries dentaires ; il aide à la minéralisation des os, au même titre que le calcium et le phosphore.
Mais lorsque la dose de fluor devient importante, elle peut provoquer la fluorose dentaire ; et, en cas de doses très fortes, la fluorose osseuse. Ces deux maladies sont fréquentes en Afrique où les eaux de boissons sont issues d’eaux souterraines assez chargées en fluor (plus de 1,5 mgF-/L pour la fluorose dentaire, et plus de 4 mgF-/L pour la fluorose osseuse).
La fluorose dentaire se traduit par l’apparition de taches blanches sur les dents ; elles évoluent avec l’âge pour devenir marron, pouvant même entraîner une calcification des dents. La fluorose osseuse, caractérisée par une fixation osseuse massive du fluor souvent d’origine hydrotellurique, se traduit par des blocages au niveau des articulations, voire des handicaps moteurs sévères.
Au Sénégal, une technique très ancienne, récemment revisitée dans le cadre du projet d’amélioration et de renforcement des points d’eau du bassin arachidier, consiste à fixer les ions fluor par adsorption sur des os calcinés.
Les eaux souterraines de ce bassin (Kaolack, Diourbel et Fatick) sont en effet connues pour leurs teneurs élevées en fluor, souvent supérieures à 5 mg F-/L. Ce projet avait conduit à la conception et à la réalisation de défluorurateurs familiaux.
Les os d’animaux collectés dans les abattoirs homologués sont calcinés, broyés, tamisés et mis sous forme d’une colonne, en y associant d’autres types de matériaux (gravier, charbon). L’eau de puits, riche en F-, passe alors à travers cette colonne qui fixera une bonne partie des F- par adsorption sur les fins grains d’os calcinés.
Cette technique permet de traiter un grand volume d’eau (concentration en fluor <1,5 mgF-/L) pour un coût de 780 à 2500 F CFA/m3 d’eau traitée (soit de 1,20 €/m3 à 3,80 €/m3).
Son usage à grande échelle n’a toutefois pu voir le jour à cause de problèmes de goût et d’odeur observés durant le traitement.
C’est la technique d’osmose inverse qui a été promue jusqu’à présent par les autorités locales, avec quelques installations fixes dans les plus grandes agglomérations. Certes cette technique permet d’avoir une eau de meilleure qualité, mais à un prix très élevé, avoisinant les 8 €/m3 ; cela s’avère extrêmement coûteux pour la population.
Un nouveau procédé prometteur
Au sein de l’Institut de chimie et des matériaux Paris-Est, nous avons mis au point une autre technique. Il s’agit d’une technique membranaire très simple, accessible et beaucoup moins risquée sur le plan sanitaire, mais avec un coût de revient très comparable à celui de l’adsorption sur os calcinés.
Sous l’effet de leur différence de concentration, les ions Cl- traversent la MEA. Les ions sodium positifs ne pouvant pas traverser la MEA, c’est une quantité équivalente d’anions F- qui doit passer du compartiment F vers C pour équilibrer les charges électriques.Cette technique, décrite dans la figure ci-contre, s’appelle la dialyse ionique croisée. On utilise une membrane échangeuse d’anions (MEA) qui ne laisse passer que les ions négatifs. Elle est constituée d’une feuille d’un polymère spécial d’épaisseur ~150 µm, placée entre deux compartiments ; l’un (noté F) alimenté par de l’eau à traiter, l’autre (noté C), contenant une solution constituée de la même eau enrichie avec du sel de cuisine (NaCl) à une concentration de 5 g NaCl/L.
Ainsi, l’eau s’appauvrit en F- et s’enrichit en Cl-, un anion très toléré par l’organisme tant que sa concentration dans l’eau potable est inférieure à ~250 mgCl-/L (La directive européenne 98/83 du 3 novembre 1998).
Pour faire circuler, à très faible débit, les solutions des compartiments F et C, un peu d’électricité de faible puissance est ici suffisante pour activer des pompes d’aquarium. En l’absence d’un réseau électrique, ces pompes travaillant en courant continu pourront être alimentées par des panneaux photovoltaïques. On pourra aussi tout simplement utiliser la gravitation pour faire couler l’eau à traiter vers le compartiment F.
Trente litres d’eau chaque nuit
Les essais au laboratoire utilisant des eaux reconstituées se sont montrés très concluants et ont permis d’optimiser les paramètres du procédé. Ces essais sont confirmés par des essais avec des eaux réelles sur un pilote de format A4.
Ce format permet de produire pendant une nuit suffisamment d’eau pour la consommation quotidienne d’une famille d’une dizaine de personnes, soit une trentaine de litres par nuit. Le coût de revient reste assez faible puisqu’il n’y a pas de dépenses énergétiques importantes et la membrane utilisée s’est avérée assez efficace.
Cependant, comme pour toute installation, le dialyseur ionique nécessite une opération d’entretien bimensuel. Il s’agit d’un lavage avec des solutions assez diluées en acide citrique ou de vinaigre, suivi d’un lavage à la soude ou à la chaux.
Fin prêt au niveau technique, le projet est aujourd’hui en attente de financement pour diffuser ces dialyseurs ioniques auprès des usagers.
Mardi 22 mars 2022 à l’occasion de la Journée mondiale de l’eau, l’IUT de Créteil-Vitry propose au public de découvrir les travaux conduits par différents laboratoires de recherche (LEESU, IMRB et ICMPE) et plusieurs entreprises ainsi que des équipements utilisés dans le domaine du traitement des eaux.
Lasâad Dammak, Professeur en Sciences des matériaux et Génie des procédés, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.