Au Soudan, le numéro 2 du Conseil militaire de transition a déploré le retour des hommes forts d’Omar el-Bechir au pouvoir. Entre le président et le vice-président, la tension est à son comble.
Pendant dix ans, il a joué au chat et à la souris avec la Cour pénale internationale. En 2009, Omar el-Bechir était la cible d’un premier mandat d’arrêt international. Bien qu’en poste, le chef de l’État soudanais était alors accusé de crimes contre l’humanité et crimes de guerre, dans le cadre du conflit du Darfour. Il a finalement fallu attendre 2019 pour que, après une importante vague de protestations contre le régime, Omar el-Bechir soit finalement destitué par l’armée. Depuis, la CPI et le Soudan négocient pour traduire l’ex-président devant la justice internationale. Mais el-Bechir, ce n’était pas qu’un homme, c’était un système. Et plusieurs complices du régime ont dû s’échapper. Pour d’autres, ils sont toujours en poste.
Quatre ans après le départ d’Omar el-Bechir, deux hommes s’opposent à la tête du pouvoir : le général Abdel Fattah al-Burhane, le président du Conseil militaire de transition, et son numéro 2 et vice-président, Mohamed Hamdan Dogolo, alias Hemeti. Deux militaires qui ont un point commun : avoir été les hommes d’Omar el-Bechir. Ce que le second tente de faire oublier. Hemeti est surtout proche du groupe paramilitaire russe Wagner, très actif en Centrafrique, tandis que les États-Unis tentent aujourd’hui de contrôler al-Burhane. Washington a un levier au Soudan : les aides au développement, qui ne seront versées que si les civils sont remis au pouvoir.
Les FSR au centre de la bataille al-Burhane-Hemeti
Mais entre Dogolo et al-Burhane, c’est aussi une sacrée bataille de communication qui a débuté. C’est à celui qui réussira à mettre mal à l’aise l’autre. Et dimanche, Hemeti a été l’auteur d’un discours pour le moins étonnant. Le militaire déplore que le coup d’État militaire de 2019 a « ouvert la porte » au retour des caciques de la dictature d’Omar el-Bechir… son ancien mentor.
Le patron des Forces de soutien rapide (FSR), accusé de nombreux massacres, a fait un étonnant mea culpa, admettant avoir fait « plusieurs erreurs », dont la dernière en date a été celle du 25 octobre 2021. Ce jour-là, Abdel Fattah al-Burhane faisait arrêter la quasi-totalité des civils du gouvernement et, selon Dogolo, ouvrait « la porte au retour de l’ancien régime ».
Sur le fond, le militaire n’a évidemment pas tort : après l’imbroglio qui a entouré le limogeage, puis le retour et enfin le départ du Premier ministre civil, plusieurs responsables, qui avaient été limogés en 2019, ont été remis à des hautes fonctions. Mais Hemeti ne tente-t-il pas là de détourner l’attention, alors que son accord-cadre en vue d’une sortie de crise n’a pas vraiment convaincu jusqu’à aujourd’hui ? D’autant que les FSR ont largement pris part à la répression des manifestations de 2019.
Dogolo aimerait que les FSR soient intégrées aux troupes gouvernementales. Or, al-Buhane n’est pas un partisan de cela. « Je ne permettrai pas aux hommes de l’ancien régime de s’immiscer » entre l’armée et les FSR, a assuré le vice-président du conseil militaire de transition. Un message offensif lancé à son président, qui milite pour une « armée unique » de défense du Soudan