Les militaires à la tête du Niger ont refusé d’accueillir une délégation de la Cedeao, de l’UA et de l’ONU. Un camouflet pour l’organisation ouest-africaine qui avait promis d’intervenir militairement si le putsch se confirmait.
C’est un nouveau camouflet pour la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). L’organisation régionale avait, il y a une dizaine de jours, lancé un ultimatum à la junte militaire qui vient de prendre le pouvoir au Niger, menaçant le Niger d’un « recours à la force » si les militaires ne rétablissaient pas « l’ordre constitutionnel » en replaçant Mohamed Bazoum à la tête de l’État sept jours après le putsch. Le délai est passé et la Cedeao semble dans l’impasse. Malgré un discours offensif, l’organisation montre une nouvelle fois ses limites.
D’autant que les militaires nigériens ont pris le pli sur la Cedeao. S’ils avait bien reçu Déby, le président tchadien, pour discuter, les nouveaux dirigeants du pays ont opposé leur veto à la venue d’une délégation tripartite, qui devait être envoyée à Niamey au nom de la Cedeao, de l’Union africaine et de l’Organisation des Nations unies.
Face à ce refus, la Cedeao a simplement affirmé qu’elle « prenait acte » de la décision des militaires nigériens. Dans son communiqué, l’organisation ouest-africaine a adouci le ton de son discours. Il n’est plus question désormais de « recours à la force » mais de « déployer toutes les dispositions nécessaires » à un retour à l’ordre constitutionnel.
Que ce soit au Mali ou au Burkina Faso, les putschistes avaient toujours accepté de recevoir des délégations de la Cedeao pour des tentatives de médiation. Cette fois, le nouvel homme fort du Niger, le général Tchiani, n’est pas décidé à se laisser faire par l’institution qui a immédiatement suspendu son pays, après le coup d’État. Si la Cedeao y voit un acte de défiance de la part de la junte, le Niger semble vouloir éviter une médiation qui ne servirait à rien.
La voie diplomatique privilégiée
Ce jeudi, la Cedeao évoquera le dossier nigérien lors d’un sommet auquel plusieurs personnalités sont invitées, comme la représentante spéciale de l’Union européenne au Sahel, Emanuela Del Re. Il s’agira, pour le « syndicat des présidents » ouest-africains, de tenter de sortir la tête haute de cette situation.
Car on ne peut pas dire que la Cedeao ait pris le lead dans ce dossier : dimanche, alors que l’ultimatum avait pris fin, l’organisation est restée muette. Pas un communiqué, pas une déclaration depuis trois jours. Et alors qu’elle menaçait d’envoyer l’armée, la Cedeao privilégie désormais la diplomatie. Bola Tinubu, président du Nigeria et de la Cedeao, et ses homologues ouest-africains « préféreraient une résolution obtenue par des moyens diplomatiques, par des moyens pacifiques », a indiqué le porte-parole du président nigérian.
Alors, quelles seront les décisions prises jeudi ? À n’en pas douter, comme pour le Mali ou le Burkina Faso, la Cedeao devrait prendre des sanctions, notamment économiques. Avec, comme bien souvent, une demande de réduction du délai de transition de la part de la Cedeao, qui semble désormais juste bonne à négocier des calendriers et des feuilles de route. Surtout qu’en menaçant le Niger d’intervention militaire, sans que cela soit suivi d’effets, l’organisation ouest-africaine a une nouvelle fois montré ses limites.