En Tunisie, deux migrants subsahariens ont été retrouvés morts ces derniers jours dans des zones désertiques, alors que plusieurs dizaines d’autres personnes sont également livrées à elles-mêmes.
Entre les discours et les actes, il y a désormais un fossé. Le 8 juillet dernier, le président tunisien Kaïs Saïed recevait sa cheffe du gouvernement Najla Bouden pour évoquer, entre autres, la question de l’immigration régulière. Le président de la République mettait alors en avant « le traitement humain reçu par ces migrants et qui découle de nos valeurs, contrairement à ce qui se raconte dans les milieux coloniaux ». Avant de s’entretenir avec le président du Croissant rouge, Abdellatif Chabou.
Selon Kaïs Saïed, pour les migrants subsahariens, tout irait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes. Sauf que depuis plusieurs jours, la situation des Subsahariens est dramatique, notamment dans la ville de Sfax, ainsi qu’aux frontières avec l’Algérie et la Libye. Plusieurs expulsions ont eu lieu ces derniers jours, qui ont même concerné des personnes présentes de façon légale en Tunisie.
Heurts violents
Tout a débuté il y a un peu plus d’une dizaine de jours. Des dizaines de migrants subsahariens ont été chassés de la ville de Sfax, après la mort d’un habitant. Des locaux, mais également des policiers, ont décidé de violemment s’en prendre à ces migrants.
Cette nuit policier et population à la pluie dans l’arrestation de noirs.
Dans cette vidéo vous verrez de Tunisie avec des bâtons à la main qu’ils s’utiliser pour enlever les subsahariennes dans Les maison par force pour leur remettre à la police. pic.twitter.com/cBJ6Gqx6g2
— je suis migrant (@jesuismigrant) July 4, 2023
Depuis, c’est une véritable chasse aux Subsahariens qui a débuté. Outre des personnes expulsées de leur maison à Sfax, certaines ont été déplacées de force vers la mer ou vers le désert à la frontière libyenne. Sans eau, ni nourriture, certains ont même parfois été parqués dans des bâtiments insalubres. Et si, selon Kaïs Saïed, ces informations sont des « fake news » provenant d’« agents étrangers », même Human Rights Watch indique que les forces de l’ordre ont « rassemblé des centaines de migrants et de demandeurs d’asile noirs africains, y compris des enfants, et les ont abandonnés dans le désert ».
Plainte de l’Organisation mondiale contre la torture
Impossible désormais de se cacher derrière de fausses informations. Car la macabre découverte de ces derniers jours montre la délicatesse de la situation des Subsahariens. Deux corps de migrants ont en effet été retrouvés dans une zone désertique à la frontière entre la Tunisie et l’Algérie. Le premier serait mort il y a une dizaine de jours, le second il y a seulement quarante-huit heures. Des témoins racontent comment des convois déposent régulièrement des migrants subsahariens dans les zones désertiques.
Et les vidéos qui circulent montrent également des femmes accouchant dans des no man’s lands, sans aucune assistance médicale. Plusieurs migrants racontent avoir été « tabassés comme des animaux ». « Les renvoyer vers la Libye qui n’est pas un pays sûr, en faisant en sorte de se dédouaner car les migrants sont dans des no man’s lands, c’est tout simplement honteux », résume sous couvert d’anonymat un membre de la société civile.
L’Organisation mondiale contre la torture a décidé de porter plainte contre la Tunisie, après avoir été saisie par une victime. Cette dernière assure avoir été privée de ses droits, avoir été arrêtée sans raison mais surtout d’avoir été frappée avec une barre de fer, avant d’être expulsée vers la frontière libyenne.