Emmanuel Macron rencontrera demain Félix Tshisekedi. Les présidents français et congolais devraient évoquer le dossier très épineux du M23 et du Rwanda.
Ce samedi, Emmanuel Macron entamera la quatrième et dernière étape de sa mini-tournée africaine, débutée au Gabon à l’occasion du One Forest Summit. Après Libreville, le président français s’est rendu en Angola, où il a rencontré João Lourenço. Entre les deux présidents, il a été question de l’aide que peut apporter Paris pour développer l’agriculture. Après son passage éclair à Luanda, Emmanuel Macron a pris la direction du Congo-Brazzaville pour s’entretenir avec Denis Sassou N’Guesso. Avant de traverser le fleuve en direction de Kinshasa, dès la nuit prochaine.
De quoi sera-t-il question entre le chef de l’État français et son homologue congolais Félix Tshisekedi ? Forcément, ce dernier devrait aborder un sujet qui lui tient à cœur. Absent du One Forest Summit, le président congolais s’était rendu en Suisse, lundi, pour parler devant le Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies (ONU). Tshisekedi a voulu rendre compte des « atrocités humaines les plus abominables » commises en République démocratique du Congo depuis trente ans et déplorer « l’impunité » du Rwanda dans le conflit qui touche l’est du pays.
Vers une nouvelle condamnation du Rwanda ?
Forcément, le président congolais devrait évoquer avec Emmanuel Macron la situation sur place. Alors que la RDC accuse le Rwanda de soutenir le M23, le chef de l’État français est dans une posture bien délicate : Macron a fait des pieds et des mains pour réconcilier son pays avec le Rwanda, il y a deux ans. Et l’on voit mal le président français lâcher son allié, Paul Kagame.
Mais après un conflit long d’un an, la RDC et le Rwanda sont proches de l’impasse diplomatique. Et malgré une promesse de cessez-le-feu décidée le mois dernier, la situation n’a que peu évolué. Au contraire, le M23 continue de prendre des territoires dans la région.
Du côté de Tshisekedi, on s’attend en tout cas à un soutien sans ambage du président français. La RDC estime que le Rwanda, en soutenant le M23, a agressé sa souveraineté. Et Félix Tshisekedi attend d’Emmanuel Macron une position claire. Il n’imagine pas que ce dernier puisse prendre la défense de Paul Kagame.
Mais le président français a en réalité trois solutions. La première : botter en touche. Après son discours pour dessiner les traits de la nouvelle politique africaine de la France, lors duquel il a prôné « une nouvelle relation, équilibrée, réciproque et responsable. », le chef de l’État pourrait très bien se positionner au-dessus de la mêlée et laisser les deux pays, la RDC et le Rwanda, régler leur différend entre eux. Sauf que, en décembre dernier, Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d’État française, s’était rendue à Kinshasa et avait déploré « le soutien du Rwanda au M23 ». Ce qui amène à une deuxième option, celle d’à nouveau condamner le Rwanda.
La médiation, la seule option ?
À l’époque, le discours était clair — et très officiel, aligné sur celui de l’Occident. Il s’agissait de se positionner en faveur de Kinshasa. « Le Rwanda, car il faut le nommer, doit cesser son soutien au M23. Il faut en finir avec la répétition de l’histoire dans cette région », avait indiqué la secrétaire d’État. Difficile aujourd’hui d’aller à l’encontre de cette déclaration pour le président français. Mais on l’a vu avec le Maroc, Paris est assez mal embarqué en Afrique et tente donc désormais de se positionner diplomatiquement de façon assez neutre.
La troisième option pour Emmanuel Macron serait de se poser en médiateur sur la question. Depuis septembre dernier, des discussions ont lieu entre les services de renseignements français, rwandais, congolais et ougandais. Paul Kagame a déjà pu s’entretenir, aux États-Unis, avec Paul Kagame, sous l’égide d’Emmanuel Macron. Mais depuis, le dossier semble gelé.
Emmanuel Macron pourrait à nouveau jouer la carte de l’apaisement et promettre de parler, de nouveau, à Paul Kagame. Il tentera également de vanter les mérites de la Force régionale de l’Afrique de l’est (EAC) et de mettre en avant le rôle du Kenya, là où la RDC n’est pas convaincue.
On l’a compris lors de son discours précédant sa tournée : Emmanuel Macron veut parler à tout le monde. Reste qu’il devra convaincre Félix Tshisekedi d’être patient. Car le président congolais est aujourd’hui excédé par l’attitude du Rwanda. Et il verrait d’un mauvais œil une inaction de la part de l’Élysée.