Alger, Tunis et Rabat sont en rupture de stocks de lait. Dans les trois pays, les autorités tentent de trouver des solutions à cette pénurie. Sans réel succès.
Algérie, Maroc, Tunisie… Les trois pays nord-africains sont confrontés à des pénuries à venir de lait. Avec des raisons différentes : baisse de production laitière nationale pour les uns, problèmes d’importations pour les autres. Au Maroc, jeudi dernier, le ministre délégué chargé des Relations avec le parlement et également porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, a confirmé les problèmes du royaume dans ce secteur, tout en restant assez évasif. « La baisse de la production du lait est due entre autres à des facteurs saisonniers » a simplement indiqué le ministre délégué, répondant à une question sur la pénurie de lait qui commence à se faire ressentir dans les étals de supermarchés.
Dans les faits, le Maroc semble être durement touché par la guerre entre la Russie et l’Ukraine, comme le reste du continent. Parmi les facteurs qui expliquent la baisse de la production locale de lait : la flambée des prix des aliments donnés au bétail et des céréales — maïs et soja principalement. Mais également les conditions climatiques. Le Maroc a connu une sécheresse importante, qui a contrait des éleveurs à fermer leurs exploitations.
En Tunisie, la situation semble être plus catastrophique. Début septembre dernier, le président du Syndicat national des agriculteurs, Midani Dhaoui, affirmait que la Tunisie ne disposait plus que de quinze jours de stocks de lait. Une crise qui touche de nombreux produits de première nécessité. Mais avec 1,5 million de litres consommés chaque jour, le lait, lorsqu’il est absent des rayons, symbolise la crise que le pays traverse.
Selon le syndicaliste, plusieurs raisons expliquent la baisse des réserves de lait : « Tout le secteur est affecté, expliquait-il au micro de Mosaïque FM le 2 septembre. En effet, le cheptel de bovins a été réduit de 35 %, soit par la vente directe, soit via les réseaux de contrebande. Soit une conséquence de l’incapacité des éleveurs à supporter les frais exorbitants de l’alimentation des troupeaux ». Comme au Maroc, l’inflation des aliments pour le bétail — dont les prix ont augmenté de près de 40 % — tuent à feu doux l’agriculture locale. Or, les tarifs du lait imposés par l’État empêchent les éleveurs de faire des bénéfices, assure le patron du syndicat agricole. Pire : chaque litre de lait produit coûte plus cher qu’il ne rapport aux agriculteurs.
Mais comme dans le royaume chérifien, ce n’est pas simplement le conflit en Ukraine qui pose problème. Interrogé par Le Monde, un agriculteur assure que « la filière est en train de mourir. Le problème de la pénurie de lait est saisonnier, on rumine les mêmes doléances tous les ans sans que ça s’améliore ». En cause, les subventions de l’État, jugées insuffisantes, et les plafonds de prix fixés dans le pays, qui obligent les éleveurs à travailler à perte. Et la promesse, la semaine dernière, de Fadhila Rebhi, la ministre tunisienne du Commerce, de trouver une solution durable ne devrait pas rassurer outre-mesure les agriculteurs.
Enfin, l’Algérie voit elle aussi la pénurie de lait pointer le bout de son nez, mais la raison de cette crise est sensiblement différentes du Maroc et de la Tunisie, Alger important de la poudre de lait. Les stocks des producteurs sont en chute libre. Africa Intelligence affirme que Tchin-Lait, qui exploite la marque Candia en Algérie, a interrompu sa production à Alger, Bejaïa et Sétif à cause d’une pénurie de poudre. Même chose pour Soummam et Hodna, qui ont livré leurs derniers stocks de lait il y a quelques jours. Les supermarchés ne sont donc plus réapprovisionnés.