Ramon Abbas, alias Hushpuppi, est accusé aux Etats-Unis d’escroqueries et de blanchiment d’argent. L’influenceur Instagram aux 2,7 millions d’abonnés risque jusqu’à 20 ans de prison.
Entre le début des années 2000 et 2012, le « broutage » était extrêmement répandu en Afrique. A l’époque, quelques cybercafés, surtout à Abidjan, en Côte d’Ivoire, accueillaient des internautes qui, à coups de mails, dépouillaient des victimes à des milliers kilomètres de là. Au Nigeria, ces petits arnaqueurs étaient connus sous le surnom de « Yahoo Boys ». Ramon Abbas était de ceux-là.
Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts : Ramon Olorunwa Abbas est devenu Hushpuppi, un influenceur Instagram suivi par 2,7 millions de personnes. Depuis juin 2020, cependant, plus aucune publication n’a été postée sur le réseau social. Et pour cause : Hushpuppi est aujourd’hui sous les verrous, en attente de son procès.
Avant, Ramon Abbas vit à Dubaï. Lors d’un raid, la police arrête l’influenceur. Ce dernier est alors extradé vers les Etats-Unis, qui l’accusent de blanchiment d’argent. Le 3 juillet 2020, il comparaît devant la justice. Selon la presse, les enquêteurs américains accusaient également Abbas d’être derrière une cyberattaque contre une banque de Malte et le détournement de 15 millions de dollars un an plus tôt.
Des millions soutirés à des Britanniques et des Qataris
Outre ces larcins, Hushpuppi est également au centre d’une affaire de tentative d’extorsion de fonds — une centaine de millions de dollars — à un club de football de la Premier League, en Angleterre.
De quoi expliquer la fortune de l’influenceur ? Celui-ci avait pris un malin plaisir, avant 2020, à s’afficher au volant de jolies voitures de sport, mais il aimait également parler de ses montres ou se montrer à bord de jets privés. A Dubaï, Ramon Abbas menait la belle vie. Il assurait alors avoir fait fortune dans l’immobilier…
L’ex-Yahoo Boy aurait en réalité continué ses escroqueries, mais à grande échelle cette fois. Il était en effet accusé d’être à la tête d’un réseau de cybercriminels. Et lors de l’arrivée de la police, qui avait perquisitionné son logement, plus de 40 millions de dollars avaient été retrouvés… en cash. Un nombre impressionnants d’ordinateurs avait également été saisi. Pire, la police avait découvert un fichier contenant les coordonnées de 2 millions de personnes.
Des réseaux partout en Afrique
La vie d’Abbas semble totalement liée à l’évolution de la cybercriminalité. Après avoir escroqué des personnes via mails, Abbas s’était lancé, comme d’autres Yahoo Boys, dans le vol d’identités et dans les « arnaques à l’amour », indique le Dr Adedeji Oyenuga, expert en cybercriminalité à l’Université d’État de Lagos, à BBC. En 2014, Abbas pose ses valises à Kuala Lumpur, en Malaisie, avant de rejoindre Dubaï trois ans plus tard.
Alors qu’il s’affiche désormais de plus en plus sur les réseaux sociaux — Instagram, l’influenceur précisant ne pas avoir Facebook ni… Tinder —, il est accusé de plusieurs opérations frauduleuses. Comme une tentative de blanchir, en 2019, 15 millions de dollars qu’un gang nord-coréen avait subtilisé à une banque maltaise. Puis Abbas a tenté d’autres fraudes, notamment via l’Amérique latine. A Dubaï, Abbas aurait arnaqué 25 personnes, en majeure partie des Britanniques. Certains ont perdu jusqu’à un demi-million de livres sterling. Il a également arnaqué un riche Qatari, grâce à des intermédiaires au Kenya, au Nigeria ou encore aux États-Unis.
L’ex-« Milliardaire Gucci Master » est donc aujourd’hui emprisonné. Son procès a débuté le mois dernier. Ramon Abbas risque jusqu’à vingt ans de prison, après avoir plaidé coupable pour son accusation de blanchiment d’argent. Son compte Instagram, lui, est toujours en ligne.