Le Soudan a promis d’extrader son ex-président Omar el-Bechir, qui est recherché depuis 2009 par la Cour pénale internationale.
Pendant une dizaine d’années, Omar el-Bechir a nargué la Cour pénale internationale (CPI) en voyageant à sa guise, principalement dans des pays n’ayant pas signé le Statut de Rome, le traité fondateur de la CPI : Maroc, Rwanda, Libye, Egypte, Djibouti ou encore Afrique du sud ont tour à tour accueilli le président soudanais qui s’est même payé le luxe de se faire annoncer à un sommet de l’Union africaine en Afrique du Sud en 2015.
Depuis 2009, Omar el-Bechir était recherché par la CPI, qui a émis un premier mandat d’arrêt international contre le chef de l’Etat soudanais pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre, dans le cadre du conflit du Darfour. Un an plus tard, la CPI l’accuse cette fois de génocide. El-Bechir deviendra le tout premier président encore en exercice à être recherché par la Cour pénale internationale. Mais depuis 2009, le Soudanais n’a jamais été livré à la CPI.
Le 11 avril 2019, alors que le Soudan est confronté à une importante vague de protestations contre le régime, Omar el-Bechir est finalement destitué par l’armée, qui l’arrête immédiatement. La junte militaire prend immédiatement les devants en annonçant que le président déchu ne sera pas transféré devant la CPI mais bien jugé au Soudan, où on lui reproche des meurtres de manifestants, des faits de corruption et de détournement de fonds. Face à la pression internationale, le général Jalaluddin Sheikh, membre du Conseil militaire de transition, nuance finalement ses propos et indique que ce sera à un futur gouvernement élu de décider si el-Bechir doit être extradé ou non.
Le Soudan va ratifier le Statut de Rome
La question a, depuis, continué à tarauder les esprits. Condamné à deux ans de prison pour détention de fonds étrangers, en provenance d’Arabie saoudite, el-Bechir devait ensuite être jugé dans plusieurs autres procès. L’un d’eux devait concerner les crimes commis au Darfour. Mais l’annonce du Conseil des ministres change la donne : ce mercredi 11 août, le gouvernement soudanais affirme en effet vouloir « remettre les personnes recherchées à la CPI ». Outre Omar el-Bechir, le Soudan va extrader deux anciens ministres, Ahmed Haroun et Abdelrahim Mohamed Hussein.
Cette décision soudanaise intervient après un intense et long travail de la part de la CPI. Décriée après l’acquittement de Laurent Gbagbo, la procureure générale de la Cour, la Gambienne Fatou Bensouda, a laissé sa place à Karim Khan en juin dernier. Le Britannique veut redonner à la CPI ses lettres de noblesse, et un procès d’Omar el-Bechir, pour des crimes commis pendant une guerre qui a fait 300 000 morts, serait une excellente opportunité pour lui. Karim Khan s’est donc rendu à Khartoum pendant une semaine pour négocier, avec le gouvernement, l’extradition de l’ex-président soudanais.
Pour le moment la date de remise à la CPI d’Omar el-Bechir n’a pas été annoncée. Mais le Soudan affirme vouloir coopérer avec la Cour dans le but d’« obtenir justice pour les victimes de la guerre du Darfour ». Si la décision est définitive, le gouvernement doit encore décider des modalités de l’extradition avec le Conseil souverain, l’instance chargée de la transition qui dirige le pays. Lors de l’accord de paix d’octobre 2020, signé entre le gouvernement de transition et des groupes rebelles, les négociations avaient porté sur l’importance de coopérer avec la CPI. Le Soudan devrait par ailleurs ratifier le Statut de Rome.