Ce mardi, les ministres algérien et marocain des Affaires étrangères se sont croisés à Tunis. Après les annonces de Kaïs Saïed, Rabat et Alger ont rappelé leur solidarité avec la Tunisie.
Depuis dimanche soir et l’annonce par le président de la République tunisienne Kaïs Saïed du gel des travaux de l’Assemblée des représentants du peuple et du limogeage de son chef du gouvernement, les réactions internationales se succèdent, bien souvent par communiqués de presse. De l’Allemagne à la Turquie, en passant par la France ou les Etats-Unis, chaque pays y est allé d’une communication écrite aux mots bien pesés.
Dès lundi, au lendemain de la décision du président tunisien de prendre les pleins pouvoirs pendant trente jours, Kaïs Saïed s’est entretenu au téléphone avec son homologue algérien. Rien n’a vraiment filtré de ce que se sont dit les deux hommes, qui ont officiellement évoqué « les développements de la situation en Tunisie ». L’Algérie veut connaître les projets de Kaïs Saïed mais semble le soutenir dans son action. Elle a envoyé son chef de la diplomatie, Ramtane Lamamra, à Tunis ce mardi. Le ministre des Affaires étrangères y a rencontré le président tunisien, sans pour autant commenter publiquement les événements récents.
L’enchaînement de rencontres a d’ailleurs donné lieu à une drôle de scène : après Ramtane Lamamra, c’est Nasser Bourita, ministre marocain des Affaires étrangères et de la Coopération internationale et des Marocains résidant à l’étranger, qui s’est rendu au palais présidentiel de Carthage.
Les chefs des diplomaties marocaine et algérienne ont tous les deux tenu à rappeler leurs liens d’amitié avec la Tunisie. Ramtane Lamamra a transmis « un message de fraternité et d’amitié de son frère le président Tebboune » à Kaïs Saïed, tandis que Nasser Bourita, lui, était chargé de transmettre un message oral de la part de Mohammed VI.
La Libye et le Sahara Occidental, des « lignes rouges »
Alors qu’Alger et Rabat tentent de tirer leur épingle du jeu dans le dossier libyen, ces dernières semaines, la Tunisie peut-elle être le point de ralliement des diplomaties maghrébines ? Les pays frères de la Tunisie multiplient en tout cas les gestes en faveur de leur voisin : début juillet, l’Algérie envoyait à la Tunisie 250 000 doses de vaccin contre la Covid-19. Deux jours plus tard, le roi Mohammed VI faisait envoyer deux unités complètes de réanimation — lits, respirateurs et générateurs d’oxygène — à Tunis.
Lors des rencontres entre Kaïs Saïed et les diplomates marocain et algérien, il n’a d’ailleurs pas été simplement question de la situation politique. Si peu d’informations ont filtré de ses discussions avec Nasser Bourita, la présidence tunisienne a communiqué sur l’ordre du jour de la rencontre avec Ramtane Lamamra : les deux hommes ont en effet discuté de la situation du Sahel, du Maghreb et de la Libye.
Et si, finalement, la Tunisie était le point de convergence de l’Algérie et du Maroc ? Les deux pays ont en tout cas des politiques similaires vis-à-vis de Tunis, ne tentant pas de s’ingérer dans les affaires internes de Kaïs Saïed mais faisant preuve d’un soutien indéfectible. L’Algérie, par exemple, n’hésite pas à inciter ses populations à se rendre en Tunisie cet été pour soutenir un secteur touristique en grande difficulté.
En réalité, tant qu’il n’est pas question du Sahara Occidental ou de la Libye, les relations entre les pays du Maghreb semblent apaisées. On avait d’ailleurs pu voir quatre pays de la région s’unir pour défendre le couscous devant l’Unesco. De quoi penser à la relance, un jour, de l’Union du Maghreb arabe ? On n’en est pas encore là. Créée en 1989, l’UMA laissait envisager un Maghreb uni. Mais les chefs d’Etat de l’organisation ne se sont plus réunis depuis 1994.