Suspendu dans plusieurs pays, le vaccin d’Oxford-AstraZeneca contre la Covid-19 inquiète en Afrique. Mais, à l’exception d’un pays, le continent a décidé de poursuivre les campagnes de vaccination.
Le week-end dernier, la République démocratique du Congo décidé de suspendre la vaccination de sa population avec les doses du vaccin AstraZeneca. Alors que l’Allemagne et la France suivaient, les autres pays africains se sont posé la question : faut-il ou non appliquer le principe de précaution, après la découverte de la formation de caillots sanguins chez certaines personnes ayant administré les doses ? Une question primordiale : alors que 24 pays africains ont reçu près de 14,5 millions de doses de vaccin dans le cadre de l’initiative Covax, une suspension aurait retardé les campagnes nationales.
Fabriqué par un laboratoire en Inde, grâce à des dons, le vaccin AstraZeneca est arrivé au Kenya, en Ouganda, au Rwanda, en RDC, au Ghana, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, au Mozambique ou encore à Maurice et aux Seychelles, entre autres. L’Afrique du Sud, touchée par un variant de la Covid-19, avait de son côté jugé le vaccin peu efficace et décidé de transmettre ses doses à l’Union africaine.
« Pas d’arguments scientifiques avérés par rapport à des effets secondaires indésirables »
Au Congo, la suspension n’est pas due aux possibles effets secondaires mais à une vérification de la conformité des produits délivrés. « Parmi les lots qui nous sont parvenus, nos laboratoires analysent pour voir la conformité de ces vaccins qui nous ont été fournis afin d’attester qu’ils ont effectivement conformes à la composition initiale des laboratoires qui les ont fabriqués pur éliminer toute suspicion, toutes les mauvaises rumeurs qui croient que nous recevons des produits piratés, des produits qui pourraient être toxiques pour notre population », a déclaré le ministre congolais de l’Intérieur Gilbert Kankonde.
Pour la RDC, c’est donc une simple suspicion de livraison de médicaments falsifiés qui serait à l’origine de la décision du gouvernement. De nombreux faux vaccins ont fait leur apparition sur le continent ces dernières semaines.
Les campagnes lancées, certains pays ne veulent pas entendre parler de suspension, à l’instar du Sénégal, dont le porte-parole du ministère de la Santé et de l’Action sociale rappelle qu’« il n’y a pas d’arguments scientifiques avérés par rapport à un quelconque effet secondaire indésirable ». Comme les autres Etats africains, le Sénégal s’appuie sur les recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Eviter la défiance des populations
Le vaccin AstraZeneca permettra des vaccinations rapides, estiment les différentes autorités du continent. « Ce qui est valable en Europe ou aux Etats-Unis ne l’est pas au Sénégal. Nous n’avons pas le même environnement, le même écosystème, le même phénotype. Donc il ne faut pas suivre à l’aveuglette, il faut continuer jusqu’à ce que les spécialistes ici fassent les mêmes constations et aller vers un arrêt suspensif si le pronostic vital était engagé ce qui n’est pas le cas encore », affirme un spécialiste à BBC.
Car au-delà du principe de précaution, c’est la santé publique qui est en jeu : stopper la campagne de vaccination reviendrait à risque de provoquer la peur des populations. Pour expliquer leur décision, les pays africains indiquent que leurs doses ne sont pas issues des mêmes laboratoires qu’en Europe. C’est la crainte du Dr Richard Mihigo, chef de secteur de programme, Immunisation et développement de vaccins à l’OMS Afrique. Il estime qu’il faut continuer à vacciner pour éviter toute défiance inutile.