Ce vendredi débute le sommet Turquie-Afrique. Malgré les intérêts turcs pour le continent, plusieurs présidents africains n’ont pas fait le déplacement.
Depuis ce vendredi, une vingtaine de chefs d’Etat africains sont à Istanbul. Jusqu’à demain, ils participent au troisième Sommet Turquie-Afrique, organisé par le président Recep Tayyip Erdoğan. Les places ont été chères. En effet, la Turquie est devenue un partenaire de choix pour l’Afrique : le volume des échanges turcs avec l’Afrique s’élève à 28,3 milliards de dollars. D’ici à 2026, la Turquie compte d’ailleurs doubler son commerce extérieur avec le continent.
Autant dire que le sommet qui se déroule actuellement à Istanbul a attiré les convoitises des chefs d’Etat africains, qui se verraient bien être les partenaires privilégiés d’Ankara. Problème : il a fallu que la Commission de l’Union africaine impose des quotas à la Turquie. En cause, la « formule de Banjul », qui impose aux pays ayant le statut de partenaire associé de l’UA de limiter le nombre de dirigeants africains lors des sommets.
Pour certains observateurs, cette « formule de Banjul » est pourtant une hérésie. « L’Afrique est consciente des nombreux problèmes que pose la multiplication de ses partenariats stratégiques. Dans le souci de rationaliser dans une certaine mesure la représentation officielle, l’Union africaine, lors de son Sommet de Banjul (juillet 2006), a décidé de définir les modalités de désignation des pays africains devant représenter officiellement le continent lors des conférences/sommets de ces partenariats », indique un diplomate.
Or, l’application de la « formule de Banjul » pose un véritable problème : sur quels critères les pays ont-ils le droit ou non de participer à des sommets ? Pour celui d’Istanbul, certains présidents ont dû annuler leur venue. Au risque de passer à côté de nouvelles opportunités, notamment économiques.
Un sommet sans plusieurs pays
« Les pays africains, en tant que groupe, gagneraient à adopter à l’égard de leurs partenaires stratégiques, une politique globale bien pensée et beaucoup mieux coordonnée, poursuit le diplomate. Alors que la multiplication des accords de partenariats se poursuit, cette absence de stratégie ou de ligne politique africaine pourrait compromettre gravement les intérêts vitaux à long terme du continent ».
D’autant que la Turquie n’est pas obligée d’accepter la demande de l’organisation panafricaine. En 2015, l’Inde avait en effet décidé de ne pas respecter la « formule de Banjul » et d’inviter tous les chefs d’Etat africains à son sommet Inde-Afrique. La Chine avait également refusé de suivre la recommandation de la Commission de l’UA. L’organisation panafricaine a, cette fois, obtenu d’Ankara que le nombre d’invitations soit limité, en envoyant un courrier le 23 novembre à l’ambassade de Turquie à Addis-Abeba.
Malgré quelques refus de la part de présidents africains, cependant, plusieurs chefs d’Etat ont bel et bien accepté de rencontrer le président turc. Parmi eux, le président en exercice de l’Union africaine, Félix Tshisekedi, mais aussi celui qui lui succèdera à la tête de l’organisation dans quelques semaines, Macky Sall. D’autres présidents, à l’instar de l’Algérien Abdelmadjid Tebboune, du Libyen Mohamed el-Menfi ou encore du Congolais Denis Sassou N’Guesso et du Nigérian Muhammadu Buhari, sont également sur la liste des invités.
Après un dîner en l’honneur de ses hôtes, le couple Erdoğan laissera ensuite place à une journée de travail. Demain, des entretiens bilatéraux et un déjeuner de travail consacré aux investissements sont au menu du sommet. Nul doute que de nombreuses annonces devraient être faites. Un pari gagnant pour les chefs d’Etat africains présents.