La cheffe du Parti destourien libre (PDL), Abir Moussi, est de plus en plus esseulée. Alors que les sondages la placent parmi les favoris de la scène politique en Tunisie, le bloc parlementaire de l’avocate s’effrite.
Il y a quelque chose de pourri au royaume d’Abir Moussi. Le boute-en-train du régime du dictateur tunisien déchu Zine el-Abidine Ben Ali a perdu les deux tiers de son support au Parlement. Au moins 14 cadres de son parti, qu’elle avait écarté, contestent sa démarche.
Anciennement secrétaire générale adjointe chargée de la femme au sein du parti au pouvoir RCD, Moussi a été l’une des défenseuses les plus ardentes du défunt Ben Ali. Au sein d’une scène politique tunisienne particulièrement populiste et chaotique, elle a réussi à s’imposer depuis 2019. Elue députée, Moussi a réuni les sympathisants de l’ancien régime sous son commandement.
Toutefois, la députée a multiplié les scènes ridicules au sein de l’Assemblée des représentants du peuple. Elle a publié plusieurs vidéos où on la voit arrêter les travaux des commissions ou de l’Assemblée en hurlant ou en insultant ses collègues. La démarche d’Abir Moussi a eu un double effet. Si, d’un côté, une partie de l’opinion publique la classifie comme un contre-pouvoir au parti majoritaire Ennahdha, son chef Rached Ghannouchi et ses alliés au parlement. Une autre partie la blâme pour ses comportements choquants, et sa participation à approfondir la division qui règne au sein de la classe politique tunisienne.
bon il suffit de lire abir moussi femme charismatique (lol), t'as pas besoin de continuer
— Afef Elgharbi 🇹🇳 (@AfGharbi) May 18, 2021
Comment Abir Moussi peut-elle rebondir ?
Au milieu de ce contexte qui a aliéné le peuple de la politique, les médias en Tunisie plébiscitent Moussi comme une potentielle dirigeante du pays. Forte d’un soutien des anciens cadres de Ben Ali, elle a même réussi à former une coalition de 16 députés à la suite des dernières élections législatives.
Nonobstant sa forte présence médiatique, qui rivalise avec celle du président Saïed, Moussi connait une chute libre. Au niveau du parlement, elle est complètement isolée. Et, plus récemment, dans son propre parti, elle fait l’objet de plusieurs plaintes en justice.
Le limogeage de 14 cadres du PDL a valu à Moussi une saisine en justice sur plusieurs fronts. D’un côté, l’ancien secrétaire général du parti, Lotfi Mahfoudhi, a réussi à soutirer les fonds du parti de ce qu’il qualifie de « dépassements et d’infractions au niveau de la gestion » de la part de Moussi. Les autres fondateurs du PDL ont liquidé les biens du parti dans plusieurs régions de la Tunisie. Pour l’entourage de la députée, il s’agit de reprendre en main la formation politique. Leur but serait de « sauver le parti de la tyrannie de Moussi ».
Cette division au sein du PDL aurait sans doute un effet sur le placement des anciens alliés de Ben Ali sur l’échiquier politique. Si certains se revendiquent de la gauche ou du centre, d’autres cherchent l’alternative auprès des républicains. A savoir le parti islamiste Ennahdha ou son allié libéral Au cœur de la Tunisie. Ou encore leurs opposants de La Réforme Nationale, appartenant à la même idéologie bourguibiste (en référence au premier président tunisien) et souverainiste, que le PDL.
Enfin, cette division met aussi un coup d’arrêt aux ambitions d’Abir Moussi qui, outre les sondages douteux, ne peut plus soutenir son poids sur la scène politique en Tunisie.
Whenever I'm feeling down, I remind myself that Abir Moussi thinks she'll be President someday, and a smile comes to my face. https://t.co/46988vaEeE
— OJ (@OrangeJuiceTN) June 25, 2021