Les électeurs gambiens votent avec des billes de cristal qu’ils glissent dans des fûts peints. Un système de vote original, qui pourrait changer dans les années à venir.
Le son est caractéristique. Lorsque, ce samedi, les électeurs gambiens entendent le son de la cloche, c’est que la bille qu’ils ont laissée tomber dans le fût a été prise en compte. Autrement dit, qu’ils ont voté. C’est une des particularités de la Gambie : à chaque scrutin, pas de bulletin, ce sont des billes qui sont utilisées pour choisir le futur président.
Historiquement, cela peut se comprendre : resté plus de 22 ans au pouvoir, Yahya Jammeh n’a jamais eu réellement d’opposition. Entre 1994 et 2017, en effet, peu nombreux étaient les candidats à oser se présenter face au dictateur, qui régnait sans partage sur la Gambie. Avant Jammeh, Dawda Jawara avait régné sur la Gambie pendant 24 ans.
Les billes sont, depuis 1965, le moyen le plus efficace de voter en Gambie. Comme le rappelle BBC, cette méthode de vote a été introduite après l’indépendance en raison du taux élevé d’analphabétisme dans le pays.
Il a, cette année, été question que les billes laissent leur place aux bulletins, plus répandus dans le monde. Notamment à cause du nombre importants de candidats qui désiraient se présenter face à Adama Barrow. Avec la vingtaine de postulants, il semblait difficile de prévoir des fûts assez importants, chaque parti ayant sa propre couleur sur ces mêmes fûts. Ils ne sont, finalement aujourd’hui, que six candidats.
Un système unique, qui garantit la transparence
L’écrivain sierra-léonais et gambien Ade Daramy écrit, sur le site de la BBC, que « la plupart des Gambiens que je connais sont assez fiers de leur système de vote unique ». Passer aux bulletins et aux urnes aurait donc été une grosse révolution pour les populations.
D’autant que le système n’est pas si mauvais que cela. Interrogé par RFI, Pa Makan Khan, porte-parole de la Commission électorale gambienne, indique que, après chaque introduction de bille, « ce bruit, cette sonnette, c’est le signal que l’électeur a voté et surtout n’a voté qu’une seule fois, comme c’est la loi en Gambie ». Pour la Commission électorale, les billes sont donc un rempart contre la fraude. Ce que confirme à la radio internationale le politologue Abdoulaye Saine, qui affirme qu’il s’agit d’« un bon système que nous avons depuis longtemps, qui va nous garantir une élection juste et libre ».
Ce système de billes unique, la classe politique a bien envisagé de le changer. Mais la volonté politique n’était pas vraiment au rendez-vous. Cependant, ce pourrait bien être la toute dernière fois que les Gambiens glissaient des billes de cristal dans les fûts. Car la Commission électorale réfléchit actuellement à passer aux bulletins en papier. Il faudra prendre le temps de penser au processus, mais selon des sources proches de la commission, la décision devrait être effective pour les prochains scrutins.