Au Malawi, 16 400 doses de vaccins contre la Covid-19 seront détruites, trois semaines après leur arrivée dans le pays. Ces doses font partie d’un lot Oxford-AstraZeneca envoyé à Lilongwe par l’Union Africaine (UA), et qui aurait atteint sa date de péremption.
Plus de 16 400 doses de Vaxzevria (Oxford-AstraZeneca) qui font partie d’un lot de 102 000 vaccins, envoyés au Malawi le mois dernier par l’UA, seront détruites. Selon le ministre de la Santé, Charles Mwansambo, les vaccins ont expiré mardi.
Sur le total de 530 000 doses reçues au Malawi, par l’UA et l’Inde via le programme Covax, 300 000 ont été utilisées à ce jour. Dans le pays de 11 millions d’habitants, le gouvernement malawien vise 60% de population vaccinée pour atteindre l’immunité collective.
Un contexte dramatique ?
« Nous avons utilisé la plupart des vaccins envoyés par l’UA. Mardi, à leur date d’expiration, il en restait seulement 16 400 qui n’avaient pas servi, qui vont maintenant être détruits et jetés », a déclaré Mwansambo. Le ministre regrette l’hésitation des Malawiens à se faire vacciner, et pense qu’au vu de la nouvelle vague de contamination, les doses « gâchées » auraient plutôt servi à sauver des vies, selon lui.
Néanmoins, le sociologue Innocent Komwa a expliqué à l’AFP qu’une certaine apathie des Malawiens envers AstraZeneca a été à l’origine du boycott progressif des vaccins. Cette nonchalance serait due aux « rumeurs qui proviennent d’Europe autour de l’AstraZeneca ». A cause de l’hésitation à se faire vacciner, le gouvernement malawien a baissé l’âge recommandé à plus de 18 ans. Cela, autant que les diverses campagnes de sensibilisation, n’a servi à rien.
De nombreux pays africains ont des difficultés à déployer des campagnes de vaccination appropriées par manque de vaccins ou par manque de personnel qualifié. D’autres, cependant, ont des difficultés à convaincre les populations de se faire vacciner, comme le Malawi, le Ghana et le Sénégal.
La destruction de milliers de doses du vaccin, à un moment où certains de ces pays africains luttent pour obtenir des doses supplémentaires, a été hautement critiquée. A ce jour, l’initiative Covax a réussi à pourvoir plusieurs pays en Afrique et ailleurs de 20 millions de doses de vaccins, dont des milliers se font jeter désormais. Pourtant, selon une étude américaine, le vaccin AstraZeneca est bel et bien efficace.
Les Services sanitaires ghanéens (GHS) ont déclaré que 800 000 personnes avaient été vaccinées contre la Covid-19 depuis le 2 mars. Pourtant, les médias d’Etat rapportent que les autorités manqueront indéniablement de temps pour administrer le reste des doses. Au Sénégal, il est possible de se faire vacciner sans distinction d’âge ou de nationalité. La vaccination a été accueillie avec prudence par les Sénégalais, qui ont des appréhensions vis-à-vis d’AstraZeneca en particulier. Un contexte « dramatique » selon l’OMS.
Les drames africains viennent toujours d’ailleurs
Il faut tout de même rappeler que c’était l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui avait imposé les régulations des échanges des vaccins aux pays africains, sans contestation de l’OMS qui plaint aujourd’hui l’hésitation des africains à se faire vacciner.
L’année dernière, la présidente de la Commission de l’Union européenne, Ursula von der Leyen, avait déclaré que l’Europe ne partagerait pas ses vaccins avec les pays non européens tant qu’elle n’aurait pas « une meilleure situation de production ». C’était la même von der Leyen qui a par la suite soutenu l’initiative Covax pour l’Afrique.
Il serait donc difficile de blâmer le cynisme des Africains pour les vaccins gâchés, lorsque l’Afrique est pourvue des vaccins autour desquels il y’a polémique. Cette même controverse sur AstraZeneca a été nourrie en Afrique par les médias d’origine européenne, la même origine de la privation du continent africain du droit de fabriquer ses propres vaccins ou d’acheter les « meilleurs » vaccins.