Sur fond de défaut de paiement de sa dette auprès de la Banque d’exportation et d’importation de Chine (Exim Bank), l’Ouganda est-il en passe de perdre l’aéroport d’Entebbe ?
Ce samedi, la presse ougandaise déplorait le fait que la Chine ait mis la main sur l’aéroport d’Entebbe. Si le gouvernement ougandais a nié les rumeurs, mais le ministre ougandais des Finances, Matia Kasaija, a d’ores et déjà présenté ses excuses au Parlement pour « la mauvaise gestion du prêt de l’agrandissement de l’aéroport d’Entebbe ». De son côté, le président Museveni réfute cet épisode.
L’histoire débute par une clause de la dette de 207 millions de dollars. Selon un rapport publié par Allafrica, « le gouvernement ougandais a signé un accord et, entre autres, a levé l’immunité pour ses actifs souverains a soulevé des questions sur le niveau de contrôle et de diligence raisonnable que les bureaucrates mènent avant d’engager le pays à l’échelle internationale ».
L’Etat ougandais s’était effectivement engagé dans un contrat d’adhésion au bénéfice de l’Exim Bank chinoise, promettant la cession de l’aéroport et d’autres actifs souverains en cas de non-remboursement de la dette.
Le prêt avait une échéance de sept ans, mais il apparaît désormais que la transaction signée avec la banque chinoise disait que l’Ouganda n’aurait aucun recours possible une fois l’échéance dépassée. En mars, le président ougandais Yoweri Museveni avait envoyé une délégation à Pékin pour une renégociation avec le gouvernement chinois. En vain.
Le piège de la dette, stratégie favorite de la Chine
Aujourd’hui, donc, l’Ouganda cherche à trouver une entente avec la Chine et à modifier les termes de l’accord pour garantir de ne pas perdre son seul aéroport international. Mais pas seulement. Parmi les clauses que le gouvernement ougandais souhaite modifier figure la nécessité pour l’Uganda Civil Aviation Authority (UCAA) de demander l’approbation du prêteur chinois pour son budget et ses plans stratégiques.
Une autre clause stipulerait que tout différend entre l’Exim Bank et l’Ouganda devra être résolu par la Commission chinoise d’arbitrage économique et commercial international. Le porte-parole de l’UCAA et le directeur général de l’Exim Bank ont nié dans des tweets séparés que le prêteur chinois avait repris l’aéroport.
Les projets chinois de le « nouvelle route de la soie » ont fait l’objet de controverses à travers le monde. Au Sri Lanka, le gouvernement a accepté en 2017 de louer un port à une entreprise dirigée par l’entreprise chinoise China Merchants Port Holdings pendant 99 ans en échange de 1,1 milliard de dollars. Au Pakistan, le projet chinois de construire un port maritime, des routes, des voies ferrées, des pipelines, des dizaines d’usines et le plus grand aéroport du pays n’a pas encore été réalisé en raison d’un chantage contre un accord énergétique.
Au Kenya, en 2018, l’Etat a failli devoir abandonner le port de Mombasa à la Chine en raison d’une dette impayée de 6,5 milliards de dollars. La même année, en Afrique du Sud, l’entreprise étatique Eskom a dû faire se séparer d’une centrale d’une valeur de 2,5 milliards de dollars au profit de la société chinoise Huarong Energy. L’Etat sud-africain a d’ailleurs préparé un recours pour tenter de faire annuler la saisie en raison d’une affaire de corruption entourant le prêt et visant le gouvernement de Jacob Zuma.