Avec le probable report des élections du 24 décembre prochain, la Libye s’attend à une crise politique. Le chef du Conseil présidentiel libyen, Mohammed el-Menfi, a décidé de faire de l’unification de l’armée sa priorité.
Comment maintenir la paix en Libye après la date du 24 décembre ? Pour le chef du triumvirat présidentiel, Mohammed el-Menfi, l’unification de l’armée, en amont, est la première des priorités. Et certainement la solution à un maintien de la paix en cas d’embrasement du pays.
De quoi expliquer la rencontre entre le chef de l’état-major de l’armée, Mohamed al-Haddad, et son homologue de l’est — le commandant des forces de Haftar —, Abderrazak Nadhouri.
En effet, cette rencontre surprenante, qui s’est déroulée dans la ville symbolique de Syrte samedi dernier, a rapidement ressemblé à un rapprochement entre Haftar et le Premier ministre Abdel Hamid Dbeibah, selon les premiers propos des observateurs. D’autant que les deux hommes risquent de se retrouver hors-jeu sur le terrain politique après le 24 décembre.
En coulisse, le président libyen el-Menfi œuvre donc pour rapprocher les militaires, afin de contenir la violence des parties qui se sentiraient lésées, à l’instar de Haftar, ou de ceux qui, comme Dbeibah, vont devoir quitter le pouvoir le 25 décembre.
El-Menfi veut maintenir la paix
Pour rappel, la nomination d’un ministre de la Défense a été au centre d’un désaccord intestin entre Dbeibah et el-Menfi. Et depuis la candidature du Premier ministre à la présidentielle, les deux hommes semblaient de moins en moins réconciliables. En effet, le Forum de Genève sur la Libye, qui a élu les deux hommes pour diriger la transition, avait exigé que ses propres membres et les élus ne se présentent pas lors des scrutins à venir.
Une promesse non tenue par Dbeibah, qui a senti son influence se raffermir ces derniers mois. Les opposants du Premier ministre, même à Tripoli, l’accusent d’ailleurs d’acheter la loyauté des juges, des responsables de la commission électorale et des responsables politiques pour arriver à ses fins, en utilisant l’argent de l’Etat, évidemment.
Dbeibah suspendu de ses fonctions, pour qu’il puisse battre campagne — une campagne qui n’a pas officiellement débuté, d’ailleurs —, au lendemain du 24 décembre, l’ex-Premier ministre deviendra illégitime. Selon la loi, seul le Conseil présidentiel restera légalement à la tête de l’exécutif après cette date. Et le président Mohammed el-Menfi le sait bien, s’il ne consolide pas sa position, Dbeibah et Haftar chercheront à contrôler les régions clés du pays, au moins militairement.
Afin de leur couper l’herbe sous le pied, el-Menfi et ses adjoints, Moussa al-Koni et Abdullah hussein al-Lafi, ont rencontré le chef de l’état-major Mohamed al-Haddad hier. Un communiqué officiel a affirmé qu’ils avaient discuté des questions relatives à une armée unifiée libre de toute ingérence politique. Une commission paritaire sera créée à cet effet.
Selon le Conseil présidentiel, la réunion était « une étape importante vers l’unification de l’establishment militaire ». « Cela servira de soupape de sécurité pour l’État et contribuera au projet de construction de l’État », lit-on dans le communiqué. La sécurité des frontières, l’immigration illégale et le crime organisé étaient également à l’ordre du jour, ainsi que la formulation de plans globaux pour organiser les milices et autres groupes armés dans tout le pays.