La nouvelle cheffe par intérim de la MANUL, l’Américaine Stephanie Williams, affirme dans un tweet être en Libye pour « diriger ». Pendant ce temps, la commission électorale libyenne prépare l’annonce du report officiel de l’élection du 24 décembre.
Il a fallu attendre la journée de samedi pour que la mission de l’ONU en Libye précise que le compte Twitter de sa nouvelle cheffe Stephanie Williams est bel et bien le sien. Un compte créé début décembre, sur lequel la diplomate va-t-en-guerre américaine définit sa mission en Libye ainsi : « J’ai clarifié les contours de ma mission en Libye. Il s’agit de diriger les trois transitions libyennes – politique, économique et militaire – ainsi que de soutenir le processus électoral », lit-on sur le fameux tweet.
1/2 I met today with Deputy President of the Presidency Council, Mr. Abdullah Al-Lafi in #Tripoli. I explained the goal of my mission in Libya, to lead the three intra-Libyan tracks – political, economic, and military – and support the electoral process. pic.twitter.com/7CvXg5DQ5H
— Stephanie Turco Williams (@SASGonLibya) December 14, 2021
Une affirmation qui n’est pas très éloignée de la vérité. Car à peine arrivée en Libye, la patronne par intérim de la MANUL a été reçue par la plupart des candidats et parties influentes du pays : Khalifa Haftar, Abdel Hamid Dbeibah, Khaled al-Michri (chef du sénat), Khaled Mazen (ministre de l’intérieur) et son prédécesseur Fathi Bachagha, les chefs des états-majors de l’est et de l’ouest, Mohamed al-Haddad et Abderrazak Nadhouri, deux membres du Conseil présidentiel libyen – al-Koni et al-Lafi –, et le patron de la National Oil Corporation (NOC) Mustapha Sanallah…
1/2 Among the wide range of various Libyan interlocutors I met so far, I had the opportunity to meet with a number of presidential and parliamentary registered candidates, in Tripoli, Misrata and Benghazi. pic.twitter.com/DUIedj423Q
— Stephanie Turco Williams (@SASGonLibya) December 18, 2021
En somme, à l’exception d’Aguila Salah, qui a nié toute rencontre avec la diplomate américaine, et Saïf al-Islam Kadhafi, ouvertement opposé à la mission de l’ONU, chaque Libyen ayant un brin d’ambitions a accouru dans le bureau de l’Américaine pour présenter ses hommages à Stephanie Williams. Autre absent de ces rencontres, le président du Conseil présidentiel, Mohammed el-Menfi, pourtant pressenti pour diriger la prochaine période de transition.
Williams et les divisions
Stephanie Williams a d’ailleurs insisté sur le « besoin de la décentralisation » quant à la gouvernance en Libye. Un autre lapsus révélateur, loin d’être une maladresse de la diplomate, expérimentée dans la fragmentation des pays. En effet, lors de ses trois années en tant que cheffe de la mission américaine en Iraq, Williams a tout fait pour exacerber la division au sommet du pouvoir.
Si Williams rencontre aujourd’hui uniquement les parties proches des Etats-Unis, ce n’est donc certainement pas dans le but de réunir, mais de mieux diviser.
Afin d’éviter cela, peu de parties libyennes font un réel effort. Une rencontre entre le chef du sénat, Khaled al-Michri, et le président du parlement Aguila Salah, aura lieu la semaine prochaine. Au menu, tenter de trouver une solution à l’impasse politique.
Parmi les déclarations attendues, celle du report officiel de l’élection présidentielle, et probablement la tenue des élections parlementaires. Aussi, les chefs du pouvoir législatif tenteront de trouver une solution à l’après-24 décembre, avec la fin du mandat du Premier ministre Abdel Hamid Dbeibah.
Stephanie Williams, un agenda américano-occidental
En effet, légalement, c’est au chef du Conseil présidentiel, Mohammed el-Menfi, de continuer à diriger la Libye après le 24 décembre. Le président libyen est le seul muni d’un mandat qui lui permette d’émettre des décrets et nommer des ministres par intérim en cas d’absence du Premier ministre.
Seulement, cette solution n’arrange pas les Américains, dont Stéphanie Williams représente ouvertement l’agenda, bien que sa position soit celle d’une dirigeante – par intérim de surcroît – d’une mission onusienne.
Pour cette raison, Chaabane ben Noor, chef d’un parti politique libyen, estime que « tout ce que fait Williams, sous le prétexte de réunir les belligérants libyens, sert les intérêts occidentaux ». Selon lui, la diplomate cherche avant tout à « frapper les intérêts russes » et « empêcher Saïf al-Islam Kadhafi de bâtir une coalition ». Ben Noor considère aussi que « du fait de cette lutte par proxy, même si les Libyens s’accordent pour une nouvelle démarche vers les élections, Williams échouera à imposer son agenda ».
Sur le plan international, le délai de l’élection présidentielle est une évidence. Mais du côté des pays voisins, les présidents tunisien et algérien ont insisté sur le fait que la transition devait être « une démarche souveraine » qui « incombe uniquement à la volonté des Libyens ». La Turquie et la Russie, elles, affirment par leurs ministres des Affaires Etrangères respectifs leur « soutien continu » à la Libye. Du côté de l’Union africaine, aucune position n’a été émise.
🔴Le président tunisien, Kaïs Saïed affirme à #Tunis que son pays coordonnait avec l’#Algérie concernant la situation en #Libye
⬇⬇⬇https://t.co/PytepEs7iI pic.twitter.com/H7X6mmvvJg— Radio Algérienne (@radioalgerie) December 16, 2021