Mali, Libye, Guinée, Tchad, Tunisie, Somalie… En Afrique, plusieurs pays en pleine transition politique doivent voter. Mais quand ? En 2022, seuls deux pays ont programmé des scrutins : l’Angola et le Kenya.
En 2021, six élections présidentielles ont eu lieu en Afrique et quatre élections législatives. A quelques exceptions près, les scrutins se sont déroulés dans le calme. Malgré des infractions relevées dans plusieurs pays. Si les urnes ont donc été dans l’actualité, le continent a également connu, en 2021, quatre coups d’Etat militaires. De plus, des élections initialement prévues en 2021 ont été reportées sine die, à l’instar des scrutins libyen et somalien.
La Tunisie et la Libye dans l’incertitude
2022 doit donc être, en théorie, une année électorale. Pour autant, peu de dates ont été fixées. Dans les pays marqués par des coups d’Etat — Mali, Guinée, Tchad et Soudan —, ce sont surtout les autorités militaires qui s’opposent à des élections prématurées. Certes, la communauté internationale sanctionne les pays qui ne respectent pas leurs agendas respectifs. Mais cela ne fait pas pour autant avancer les choses : en Somalie, l’impasse politique dure désormais depuis dix mois, et avec la guerre entre le président Farmaajo et son Premier ministre Roble, rien ne dit qu’une solution sera trouvée en 2022.
En Afrique du Nord, la Tunisie et la Libye sont, également, dans l’incertitude. En Tunisie, le coup d’Etat constitutionnel du président Kaïs Saïed, qui s’est arrogé tous les pouvoirs le 25 juillet dernier, devrait théoriquement donner lieu à un référendum constitutionnel suivi par des élections en fin d’année.
En Libye, depuis le report de l’élection présidentielle annoncé à moins de deux jours de sa date, aucune nouvelle date n’a encore été fixée. Même si, du côté des autorités électorales, on affirme que le report ne devrait pas dépasser les deux mois. Néanmoins, l’expérience récente des élections libyennes a montré qu’avant l’organisation d’un scrutin libre, équitable et paisible, un consensus devait être trouvé entre tous les acteurs.
Coups d’Etat et gouvernement par intérim bien installés
Au Soudan, les désaccords entre les autorités civiles et militaires au sein du gouvernement de transition ont mené vers un coup d’Etat en octobre dernier. Depuis des semaines maintenant, les manifestants contre le putsch se font tuer dans les rues de Khartoum. La situation est très explosive pour le pays qui a déjà connu des années de guerre et de pauvreté.
En Afrique de l’ouest, les coups d’Etat en Guinée et au Mali, beaucoup plus acceptés par les populations locales, ont abouti à la mise en place de gouvernements d’intérim bien installés. Mais c’est surtout du côté de la Cedeao et des diplomaties occidentales que cela dérange, ces dernières ne cessant de faire pression pour la tenue urgente d’élections dans les deux pays.
La Cedeao a perdu beaucoup de sa crédibilité durant les mois passés car, en poursuivant ces agendas électoraux intenables, l’instance sous-régionale s’est mise à dos l’opinion publique de tous les pays ouest-africains.
Au Tchad, l’assassinat du président Idriss Déby Itno, à peine réélu pour un sixième mandat, a exacerbé l’entrisme français dans le pays. Le fils du défunt président, et actuel dirigeant intérimaire du pays, le jeune Mahamat Déby, a toutefois montré une certaine habilité à convaincre l’opposition de ne pas en découdre avec les armes.
De plus, fin 2021, le jeune putschiste a également bien fait comprendre que si la France ne payait pas pour les pourparlers entre le pouvoir et l’opposition, et le scrutin qui devait s’en suivre, le Tchad ne pourrait pas tenir sa feuille de route et devrait donc faire durer un peu plus longtemps la transition.
Le Kenya, baromètre de l’Afrique de l’Est
En Angola, João Lourenço, à la tête du pays et du parti historique de gauche, le MPLA, se retrouvera face à l’UNITA et son actuel chef, Adalberto Costa Júnior, lors des élections générales d’août. Malgré un bilan dans la moyenne haute, João Lourenço aura fort à faire pour convaincre les Angolais de lui confier un second mandat à la tête du pays en août.
Mais, surtout, l’histoire de la violence politique dans le pays fait craindre le pire, et la crise socio-économique provoquée par la chute du cours du pétrole, le piège de la dette chinoise et la pression du FMI, pèseront lourdement sur la campagne.
Enfin, c’est au Kenya que se jouera une élection présidentielle qui pourrait définir le contexte géopolitique en Afrique de l’Est pour les années à venir. Le président Uhuru Kenyatta doit quitter le pouvoir. Toutefois, le président kenyan est en désaccord avec son ancien colistier, le vice-président William Ruto. Uhuru Kenyatta soutient, pour les élections générales du 9 août prochain, son opposant historique Raila Odinga.
Seulement voilà, durant les mois passés, Kenyatta a établi de nouveaux partenariats avec les pays voisins, notamment avec le Rwanda, l’Ouganda et la Tanzanie. Il a également mis fin à d’autres alliances, comme avec l’Ethiopie et la Somalie. Avec la sous-région menacée par l’insécurité en raison des conflits civils et de la menace terroriste, le changement de leadership au Kenya pourrait mettre un coup d’arrêt au bon voisinage, ou le promouvoir, cela dépendra des résultats des élections.