Lundi, la Cour constitutionnelle de République centrafricaine a enterré certaines dispositions du projet Sango Coin. Un coup dans l’aile pour le gouvernement qui va devoir revoir sa copie.
En avril dernier, la République centrafricaine annonçait l’adoption prochaine du bitcoin comme monnaie officielle — en plus du franc CFA — et qu’elle allait légaliser l’usage des cryptomonnaies. A défaut d’avoir perduré, ce nouveau système monétaire aura permis de lancer un grand débat en Afrique. Car quatre mois plus tard, et à peine deux mois après son lancement, le fameux projet Sango Coin est passé à la trappe, dans sa forme actuelle, après l’annulation de certaines dispositions par la Cour constitutionnelle centrafricaine.
A l’origine, le Président Faustin-Archange Touadera imaginait que, dans l’un des pays les plus pauvres d’Afrique, les cryptomonnaies allaient faciliter les investissements et le commerce transfrontalier. S’il parlait de « décision historique », le président centrafricain avaient brûlé les étapes, selon les spécialistes qui s’étonnaient du manque d’encadrement légal du projet.
La République de Centrafrique (RCA) s’est rapidement mise les institutions financières continentales à dos. Dès l’annonce de Touadera, la Banque des Etats d’Afrique centrale (BEAC) avait jugé que celle-ci contrevenait aux « mœurs communautaires ». Mais le ministre centrafricain des télécommunications, Justin Gourna-Zacko, répondait que « le gouvernement n’a pas besoin de solliciter l’avis des institutions internationales bancaires pour utiliser la cryptomonnaie ». Il poursuit : « Nous avons travaillé avec les juristes et financiers qui nous ont dit qu’ils n’ont pas d’incompatibilité entre les textes internationaux et les nôtres ».
Ne pas dilapider les richesses nationales
Alors que le 25 juillet dernier, la RCA comptait mettre en vente 210 millions de « sango coin », le bitcoin national, la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) avait obtenu, de la part de Bangui, le gel de sa décision, en attendant des négociations entre les institutions financières et le gouvernement centrafricain.
Ce lundi 29 août, la Cour constitutionnelle s’est appuyée sur l’article 80 de la Constitution centrafricaine, indiquant que « la vente de la nationalité centrafricaine est inconstitutionnelle et est annulée ». Aucun recours, pour Bangui, n’est désormais possible, qui va devoir revoir sa copie. Les textes prévoyaient que « les investisseurs étrangers du Sango coin pourront acheter la citoyenneté centrafricaine pour 60 000 dollars en cryptomonnaies à condition de détenir des Sango-coins équivalents pendant au moins 5 ans ».
La Cour constitutionnelle a été saisie il y a un mois par les membres du Groupe d’action des organisations de la société civile pour la défense de la Constitution du 30 mars 2016. Ils estimaient que le projet Sango Coin allait dilapider la nationalité centrafricaine, les terres et les ressources naturelles du pays. « Il y a lieu en conséquence de déclarer inconstitutionnelle la vente de terrains et des richesses naturelles, telles que prévues par le document officiel Sango Genesis Paper et sur le site Sango.org, et d’annuler les dispositions relatives », estime la Cour constitutionnelle.