La présidence tunisienne a annoncé plusieurs mesures en faveur des migrants subsahariens ou de ceux qui veulent rentrer dans leur pays, dix jours après un discours qui a provoqué la panique chez ces derniers.
Le mal est fait. Depuis le discours du président tunisien Kaïs Saïed contre les migrants subsahariens, le chef de l’État allant jusqu’à accuser ces derniers d’être la source de « violences, de crimes et d’actes inacceptables », plusieurs pays ont demandé à leurs ressortissants, dans un premier temps, de penser à un retour volontaire dans leur pays d’origine, avant de débuter les rapatriements. De la Guinée au Mali, en passant par la Côte d’Ivoire, des centaines d’étudiants subsahariens ont rejoint leur pays.
Depuis le 21 février, les Subsahariens vivent la peur au ventre. Le président tunisien, lui, est désormais sous le feu des projecteurs. Alors que la Banque mondiale a annoncé la suspensions de son cadre de partenariat avec la Tunisie, nul doute que d’autres sanctions devraient être prononcées contre le pays nord-africain.
Si des sources indiquaient que, du côté du palais de Carthage, le président regrettait sa sortie sur le sujet, le ministre tunisien des Affaires étrangères, Nabil Ammar, affirmait que le président tunisien n’avait « porté atteinte à personne » et qu’il n’était « pas question d’excuses du tout ». « Les autorités tunisiennes sont dans leur droit d’alerter quand il y a des flux croissants d’immigrés illégaux avec toutes les conséquences que cela peut entrainer », avait complété le ministre.
Les Subsahariens, pour beaucoup d’entre eux étudiants, ont pris, de leur côté, les propos du chef de l’État comme un ultimatum. Mais aussi comme le lancement d’une chasse aux sorcières. Avec un racisme bien ancré en Tunisie, les Noirs ne se sont pas sentis en sécurité ces derniers jours. Et le fait que Carthage ne nuance pas ses propos a été mal perçu.
Du racisme… à l’antiracisme !
Ce dimanche 5 mars, la présidence a finalement décidé de parler. Et d’annoncer des mesures en faveur des Subsahariens. Dans un premier temps, la présidence tunisienne « exprime son étonnement face à cette campagne l’accusant d’un prétendu racisme ».
Carthage propose également plusieurs mesures comme la délivrance de cartes de séjour d’un an au profit des étudiants des pays africains, la prolongation de la durée de résidence de trois à six mois, l’aide aux départs volontaires et l’exemption du paiement des pénalités de retard pour les migrants ayant dépassé la limite de séjour, dans le cadre du retour volontaire.
En réalité, si le texte dénonce le racisme, le trafic humain et l’exploitation des migrants irréguliers, ces propositions restent tardives. Elles répondent à l’urgence qui touche les Subsahariens illégaux candidats au retour volontaire. Car ceux-ci doivent payer des pénalités importantes avant de pouvoir passer la douane. Or, le discours de Kaïs Saïed a précipité ces départs, sans qu’un aménagement de ces pénalités ne soit prévu.
Depuis près de deux semaines, le silence assourdissant de Carthage a cependant été très remarqué. Difficile aujourd’hui d’expliquer après un tel discours du président Saïed que des mesures en faveurs des migrants subsahariens soient annoncées. Si ce n’est pour sauver la face d’un pays dont l’économie dépend, en partie, de l’Afrique.