Malgré des initiatives et des textes mis en place par l’Union africaine, l’Afrique a du mal à lancer une production de médicaments génériques digne de ce nom.
Ce mardi 23 août, Africa Intelligence indique que « Nairobi se rêve en capitale régionale des médicaments génériques » et que le gouvernement sortant a lancé une opération de soutien envers les entreprises kenyanes qui veulent se lancer dans la production de médicaments génériques. L’occasion de développer un marché quasi vierge.
Car l’Afrique est aujourd’hui ultra dépendante des autres continents, dans ce secteur. L’Europe fournit en effet actuellement près de la moitié des produits pharmaceutiques qu’elle consomme. Plus globalement, l’Afrique importe plus de 80 % de ses produits pharmaceutiques et de ses consommables médicaux.
Pourtant, plusieurs pays ont tenté de se lancer dans la fabrication de médicaments. A l’instar de l’Afrique du Sud, du Kenya, du Maroc ou encore de l’Egypte. Selon les autorités de ces pays, ces derniers couvrent entre 70 % et 80 % de leurs besoins. Le Gabon a lui aussi lancé, en novembre 2020, une première usine de production de médicaments.
La Covid-19 a montré la dépendance de l’Afrique
Reste que le constat est inquiétant pour les autres Etats, et la pandémie de Covid-19 a mis en exergue le vide pharmaceutique de l’Afrique ainsi que la forte dépendance du continent vis-à-vis de l’Occident.
En 2005, pourtant, l’Union Africaine (UA) prenait la décision de lancer l’Agence africaine du médicament et publiait une « loi type » sur la règlementation des produits médicaux. Deux ans plus tard était lancé le Plan de fabrication pharmaceutique pour l’Afrique (PMPA). Ce n’est qu’en 2012 que la Conférence des chefs d’Etat de l’UA approuvait un plan d’affaires PMPA, qui doit permettre, indique l’ONU, de « stimuler la production pharmaceutique locale et d’améliorer ainsi les résultats en matière de santé publique ».
Mais en attendant son effectivité, l’Afrique peine à mettre en place une industrie pharmaceutique digne de ce nom. Comme en Tunisie, où la Pharmacie centrale n’est plus que très rarement livrée en médicaments, et même en génériques, à cause de défauts de paiement.
L’urgence est pourtant là : outre la dépendance du continent aux pays étrangers, ce phénomène a également fait exploser un autre marché, celui des médicaments contrefaits, qui représenteraient près de 60 % des médicaments consommés en Afrique. Quant aux médicaments périmés, ils continuent à être vendus aux populations.
Un vide à combler
L’ONU est consciente des freins au PMPA : « Le plan d’entreprise du PMPA souligne l’urgence de relever les défis auxquels l’industrie est confrontée. L’un de ces défis est le manque de financement abordable et de technologie moderne, qui entrave l’expansion des entreprises, écrit l’organisation internationale. D’autres défis sont les petits marchés fragmentés de l’Afrique et la faiblesse des cadres réglementaires. L’insuffisance des capacités en ressources humaines entrave également la croissance du secteur pharmaceutique africain, tout comme les mauvais systèmes d’approvisionnement et de passation des marchés et les incohérences politiques des départements du commerce, de l’industrie, de la santé et des finances des pays ».
Pour les Nations unies, « en raison d’un manque de capacité financière, les entreprises n’investissent pas ou peu dans la recherche et le développement et dans la protection de la propriété intellectuelle ». L’ONU affirme cependant que la Zone de libre-échange continentale africaine (Zleca) pourrait permettre de combler le vide dans ce secteur. Mais on en est encore loin…
Pour Janet Byaruhanga, chargée de programme principale, santé publique, à l’Agence de développement de l’Union africaine (AUDA-NEPAD), l’Afrique « doit mettre en œuvre des politiques de facilitation du commerce. Les pays doivent renforcer et harmoniser leurs systèmes réglementaires pour assurer la qualité des produits médicaux et veiller à ce que les fabricants locaux respectent les normes internationales ». Car, dit-elle, « lorsqu’il sera pleinement mis en œuvre, le plan d’affaires du PMPA créera des emplois pour des millions de chômeurs africains et inaugurera une économie de la connaissance qui sera le moteur de la quatrième révolution industrielle ».