Après la mort d’une touriste française à Dakhla, attaquée par des chiens errants, la question de la prolifération des canidés au Maghreb refait surface.
Ce mardi, à El Argoub, non loin de Dakhla, une touriste âgée de 44 ans a été attaquée par une meute de chiens errants. Mordue à plusieurs reprises, la quadragénaire est morte. Un drame qui alimente les pages de faits divers, notamment en France, pays d’origine de la touriste décédée.
Plus qu’un simple fait divers, ce drame représente surtout un phénomène qu’ont du mal à endiguer les autorités marocaines et, plus globalement, maghrébines. Car dans les rues des municipalités marocaines, algériennes ou tunisiennes, il n’est pas rare de croiser des meutes de chiens errants. En avril, les médias relataient les cas d’une collégienne décédée après une attaque de chiens errants en Tunisie ou encore d’un jeune garçon tué par une meute en Algérie.
Des stérilisations pour endiguer la prolifération
Et les politiques concernant ces animaux diffèrent selon les pays. D’après le journal Al Akhbar, le ministère marocain de l’Intérieur, qui abattait autrefois les chiens errants, a récemment mis fin à cette pratique jugée barbare par de nombreuses associations de protection des animaux. En lieu et place de l’abattage, les autorités marocaines procèdent donc à des stérilisations : toujours selon Al Akhbar, plus de 140 000 chiens sont, chaque année, stérilisés.
Une politique qui pourrait être efficace sur le long terme. En attendant, les municipalités marocaines sont confrontées à ce phénomène sans pouvoir y trouver de solution. Conséquence : chaque année, on enregistre dans le royaume entre 20 et 30 décès après des attaques de chiens errants.
Outre les morsures, ce sont les maladies qui provoquent des décès. Et au Maroc, le ministère de la Santé a décidé d’agir en allouant un budget de 40 millions de dirhams à des campagnes de vaccination contre la rage et au développement de traitements pour les citoyens victimes de morsures.
Vaccinations et abattages
A Tunis, le phénomène n’est pas différent. En 2021, cinq personnes seraient mortes après avoir été mordues par des chiens errants porteurs de la rage. Selon le ministère tunisien de l’Agriculture, rien que dans le grand Tunis, plus de 55 % des chiens errants seraient contaminés.
Comme au Maroc, la Tunisie avait une politique radicale de lutte contre le phénomène : des campagnes d’abattages massifs étaient organisées pour endiguer la prolifération des animaux. Récemment, des programmes de vaccination ont débuté, mais en majorité destinées aux propriétaires de chiens. L’objectif est de vacciner 70 à 80 % des chiens de Tunis, sans toutefois que les autorités n’avancent de calendrier. Les animaux errants, eux, sont capturés puis stérilisés, comme dans le royaume.
La Tunisie a également ouvert cinq centres vétérinaires, qui doivent permettre de contrôler la population canine et venir à bout de la reproduction des chiens errants.
Mais dans les faits, plusieurs sources affirment que les chiens continuent à être abattus. Comme le rappelle Slate, « l’administration (tunisoises) demeure pourtant rétive à communiquer sur ses actions. (…) Les réticences procédurales ne sont sans doute pas étrangères aux dernières polémiques relatives aux actions de la municipalité, qui en 2020 avait relancé une campagne d’abattage, comptant parmi ses victimes des chiens déjà bagués, avant d’interdire finalement la pratique ».
Les associations à la rescousse de l’Etat
Outre les politiques de vaccination et de stérilisation, n’y a-t-il pas d’autres raisons qui expliquent que les chiens errants continuent de proliférer ? Tout d’abord, il y a les lois sur les adoptions de chiens dangereux qui ne sont pas respectées par les citoyens. En Tunisie comme au Maroc, on ne compte plus les propriétaires de pitbulls et autres chiens dangereux qui abandonnent ensuite leur animal.
En plus des politiques — très timides — des gouvernements tunisien et marocain, il faudrait des campagnes de sensibilisation, selon les associations. Celle de Protection des animaux de Tunisie (PAT) estime qu’il faut mettre en place « une loi obligeant les propriétaires à marquer leurs chiens pour qu’ils ne puissent plus être jetés impunément à la rue ». L’association déplore également le manque de centres de gestion des chiens errants.
Des associations qui font, en réalité, le travail de l’Etat, trop occupé sur d’autres fronts pour endiguer le phénomène des chiens errants. Mais les derniers décès relancent une nouvelle fois la polémique. Et montre l’impuissance des pays à trouver des solutions.