Après une guerre civile de 27 ans, qui a causé plus d’un millions de morts et cinq millions de déplacés, l’Angola a dû se reconstruire après 2002. Depuis, le pays s’est allié à la Chine. Un partenariat par vraiment win-win.
La guerre angolaise a ravagé l’économie du pays. Et pourtant, le pays s’est rapidement redressé : grâce au pétrole et aux minerais notamment, l’Etat a vu sa croissance enregistrer un bond annuel à deux chiffres entre 2002 et 2008 — environ 10 %.
La forte hausse des cours de pétrole à cette époque et l’augmentation de la cadence de production et d’exportation ont largement contribué à cette croissance. Surtout avec un client comme la Chine, devenue la première destination des exportations angolaises, remplaçant les Etats-Unis.
Mais à trop se frotter à la Chine, on s’égare parfois. Certes, le début de la collaboration entre le Pays du Soleil levant et l’Angola a permis le développement de plusieurs secteurs dans le pays. Mais à quel prix ?
Un vrai partenariat entre l’antilope et le dragon
Après la guerre civile, cependant, l’Angola n’a pas vraiment eu le choix… L’Angola a vu l’étau se resserrer avec le Fonds monétaire international, qui proposait des prêts contre des conditions inacceptables pour le régime de dos Santos. Le pays s’est donc tourné vers un nouvel allié : la Chine. L’empire asiatique a alors financé à 82 % le programme de reconstruction de l’Angola en 2004. Les flux commerciaux et financiers entre les deux pays ont dépassé toutes les attentes.
La Banque de développement de Chine (CDB) et la Banque d’exportation et d’importation de Chine (EXIM) ont canalisé, à eux deux, 71 % des flux réels des recettes de l’Etat angolais entre 2002 et 2017. L’Angola a été de loin le premier destinataire du financement chinois des infrastructures, avec plus de 35 milliards d’euros de prêts pour investissement entre 2000 et 2020.
Une « angolanisation » ratée
Les prêts et les investissements chinois avaient, sur le papier, des conditions avantageuses, mais fragilisaient la politique d’« angolanisation », qui consiste à obliger les groupes étrangers sur place à recruter des salariés locaux.
Contre investissements, la Chine a bien avancé ses pions : les lignes de crédit chinoises à l’Angola stipulaient en effet que 70% des appels d’offres publics pour les contrats de construction et de maintenance devaient être attribués à des entreprises chinoises. La politique d’« angolanisation », elle, oblige depuis les années 1960 les entrepreneurs étrangers à créer 70 % d’emplois locaux.
Mais toute loi se contourne, même celle qui concerne l’« angolanisation ». Si les textes angolais imposent aux groupes étrangers de recruter sur place, la Cour suprême a rendu un jugement qui stipule que les entrepreneurs étrangers peuvent venir avec leur propre main-d’œuvre si les postes concernés demandent une qualification introuvable sur le marché de l’emploi angolais.
L’investissement massif des recettes de l’Etat dans les infrastructures de la capitale Luanda, ainsi que le financement et la promotion de l’investissement étranger, surtout dans le pétrole, n’ont pas aidé au respect de l’« angolanisation ». L’Angola post-guerre est resté un pays hautement analphabétisé… jusqu’à aujourd’hui.
Pire encore, depuis le boom économique de 2002, l’Angola attire de plus en plus de cadres portugais et chinois qui occupent des postes clé dans l’administration centrale des entreprises publiques.
Malgré le bond du PIB durant la première décennie du 21e siècle, les taux de pauvreté, eux, n’ont enregistré qu’un léger déclin de 36 % en 2002 à 32 % en 2017.
La corruption et le népotisme à l’origine des malheurs
Avant la fin du règne de son règne, José Eduardo dos Santos, président de l’Angola de 1979 à 2017, a mis en place le gouvernement le plus corrompu au monde. Il s’est entouré de conseillers financiers qui détournaient régulièrement les fonds des revenus pétroliers et des crédits chinois au profit de la famille présidentielle.
L’épicentre de la corruption des dos Santos reste la fille du président, Isabel, qui a forcé les instances commerciales de l’Etat à une exploitation pétrolière chinoise aux termes désavantageux. Selon Transparency International, Isabel dos Santos et son mari Sindika Dokolo ont eux-même facilité le monopole chinois sur le secteur pétrolier de l’Angola.
Le couple a bâti un conglomérat commercial avec 381 entreprises dans 41 pays, d’une valeur de presque 4 milliards de dollars américains.
Après la fin des 38 ans de présidence de dos Santos père, l’actuel président João Lourenço a initié une campagne anti-corruption. Isabel a été démise de la présidence de la Sonangol, la compagnie nationale des hydrocarbures. Elle a cependant réussi à transférer la totalité des fonds de la société vers l’étranger. L’ex-président, quant à lui, est en fuite en Espagne.
Le seul membre de la famille à avoir écopé d’une peine de prison est le fils de José Eduardo dos Santos, José Filomeno, qui a été condamné à cinq ans d’emprisonnement pour fraude et blanchiment d’argent.
Aujourd’hui, l’Angola souffre d’une terrible récession depuis six ans, qui trouve ses origines dans la corruption de l’ancien régime et la baisse du cours du baril de pétrole en 2016. La dette externe de l’Angola a augmenté de 10 milliards de dollars en 2006 à 60 milliards en 2020. Le ratio de la dette extérieure au PIB est de… 124 %.
Même si le gouvernement angolais a sollicité l’aide du FMI pour tenter de juguler sa dette, la CDB chinoise détient une majorité écrasante de la dette extérieure de l’Angola. C’est à se demander si une solution concrète existe pour l’Angola, au bord de la faillite.