Accusée par un rapport de l’Inspection générale de l’État de mauvaise gestion du Conseil économique, social et environnemental, Aminata Touré y voit un complot contre elle. L’ex-Première ministre pourra-t-elle se relever de telles accusations ?
En septembre dernier, elle avait balayé d’un revers de la main « la question du troisième mandat impossible, impossible juridiquement, impossible moralement ». Évidemment, Aminata Touré parlait de « son » président, Macky Sall, dont elle avait conduit la campagne législative un peu plus tôt. Autrefois alliée numéro 1 de Macky Sall, avant d’être virée du Conseil économique, social et environnemental (CESE) du Sénégal, fin 2020, « Mimi » était finalement revenue défendre le chef de l’État lors de législatives très périlleuses pour la coalition au pouvoir.
Le Conseil économique, social et environnemental du Sénégal, c’est justement ce qui vaut aujourd’hui à la candidate à la présidentielle un retour de boomerang. Un rapport de l’Inspection générale de l’État (IGE) pointe en effet une mauvaise gestion de l’institution par l’ex-alliée de Macky Sall.
Une attaque deux jours après sa candidature
Un timing, selon Aminata Touré qui a publié un communiqué de presse, qui ne doit rien au hasard : « Deux jours après l’annonce de ma candidature à l’élection présidentielle de 2024, deux journaux de la place informent ce matin que j’aurais été épinglée par un rapport de l’IGE finalisé en mai 2022 et remis au président de la République, qui a ensuite fait de moi la tête de liste de sa coalition aux élections législatives ».
Sur le fond, la critique de « Mimi » Touré n’est pas fausse : si une note provisoire de l’IGE existe bien sur son mandat à la présidence du Conseil économique, social et environnemental, l’Inspection générale n’a en effet pas publié de quelconque document. La presse évoque cependant, de la part d’Aminata Touré et du CESE, un « budget en marge des lois et règlements en vigueur », des fonds envoyés « vers des destinations inconnues » et une « violation systématique des règles applicables en matière de passation et d’exécution des marchés publics ».
Outre des problèmes de gestion, le document évoquerait des retraits d’argent liquide pour un montant de 1,4 milliard de francs CFA (plus de 2 millions d’euros), entre janvier et décembre 2020. Des anciens collaborateurs d’Aminata Touré assure que les fonds étaient retirés à destination de la présidente du CESE et que cette dernière était la commanditaire des transferts dont on ignore la destination.
La contre-attaque d’Aminata Touré
Un coup dur pour Aminata Touré. Mais aussi, par ricochets, pour Macky Sall. Car « Mimi » était aussi la « Madame bonne gouvernance » du président sénégalais. Si les faits étaient avérés, cela constituerait une arme dangereuse contre le président de la République. L’ancien ministre Babacar Bâ a été le premier membre de la société civile à demander « que le rapport de l’IGE soit déclassifié ».
De son côté, Aminata Touré « dénonce une information totalement fausse, ayant pour seul but de porter atteinte à (son) honorabilité et, par la même occasion, de créer un contre-feu à la gestion scandaleuse des 1 000 milliards des fonds Covid ». Autrement dit, Touré y voit plutôt une manœuvre de la part du pouvoir en place pour affaiblir son influence, à un an de la présidentielle. L’ex-présidente du CESE a par ailleurs demandé « une audition publique collective de l’Inspection générale de l’État, des trois présidents du CESE nommés par Macky Sall – à savoir Aminata Tall, qui a exercé pendant six ans, (…), Aminata Touré, (…), et l’actuel président du CESE, Idrissa Seck ».