Au Maroc, les trois violeurs d’une fillette de 11 ans ont écopé de peines ne dépassant pas deux ans de prison. Leur procès en appel débute, mais les ONG craignent des peines trop clémentes.
« Un crime aussi atroce ne doit pas laisser de marge aux juges pour alléger la peine à ce point ». Interrogée par RFI, Khaoula Assebab, présidente de Jossour forum des femmes marocaines, est énervée. Et pour cause : au Maroc, trois hommes reconnus coupables de viols sur une fillette de 11 ans ont été condamnés à des peines légères. Alors qu’ils risquaient jusqu’à 30 ans de prison, comme le propose le Code pénal marocain, ils ont écopé de peines allant jusqu’à deux ans de prison seulement.
Le cas de cette fillette de 11 ans n’est pas isolé. On se souvient, en septembre dernier, du débat provoqué par la mort d’une jeune Marocaine de 15 ans, décédée alors qu’elle tentait d’avorter après avoir été violée. La question de l’impunité des violeurs se posait alors.
En théorie, le viol est pris en compte par les autorités parlementaires qui, en 2021, avaient adopté une loi pénalisant les violences faites aux femmes, de façon générale. Le ministère de la Famille évoquait alors certains actes comme « des formes de harcèlement, d’agression, d’exploitation sexuelle ou de mauvais traitement » et promettait de durcir les sanctions.
Mais les légères condamnations des trois violeurs montrent qu’on est loin de tout cela. En 2021, le Mouvement alternatif pour les libertés individuelles (MALI) avait déjà prévenu que la loi « ne criminalise pas le viol conjugal et ne protège aucunement les femmes ». Or, selon une étude du ministère de la Famille, une femme marocaine sur deux assure avoir été victime de violences. Et dans 30 % des cas, on parle de viols.
Un message d’impunité
Les viols commis contre la fillette de 11 ans ont provoqué la colère de manifestants, qui sont descendus dans la rue pour dénoncer le laxisme de la justice. « Nous nous sommes rassemblés aujourd’hui pour demander comment la justice a pu rendre cette décision alors que la loi dit que le viol sur mineur est puni de 10 à 20 ans de prison. Nous demandons non seulement que le jugement soit revu, mais aussi que le code pénal soit modifié », résume Khadija Zeriri, l’une des organisatrices de la marche de protestation.
« Le problème n’est pas seulement dans les textes, nous résume un avocat sous couvert d’anonymat, mais le fait que les juges aient une marge de manœuvre trop importante ». Pourtant, rien d’anormal à ce que chaque cas soit étudié de façon à ne pas commettre d’erreur. Mais comment les juges ont-ils pu être si cléments avec les violeurs d’une fillette ?
« Cela envoie un message d’impunité aux violeurs d’enfants », résume un manifestant. Le ministère de la Justice s’est lui aussi étonné de la sentence prononcée contre les coupables. Et le parquet a fait appel de la décision. Ce jeudi, un nouveau procès débute, cette fois à la Cour d’appel de Rabat. Et tout le monde espère que les peines seront revues à la hausse.
Pour les ONG et la société civile, ce procès en appel n’est qu’une goutte d’eau dans un océan d’injustices liées aux affaires de viols. Toutes demandent un durcissement du Code pénal et, notamment, concernant les viols sur mineurs.