Le fils du président gabonais n’est plus le coordinateur général des affaires présidentielles. Si certains y voient une brouille familiale, l’opposition estime qu’il s’agit d’une manœuvre politique.
Dans la famille Bongo, le fils est-il en train de perdre de son influence ? Lundi, un communiqué de presse a été publié après le conseil des ministres. Ce dernier a fait l’effet d’une bombe dans les sphères politiques, à deux ans d’une présidentielle très attendue. Noureddin Bongo Valentin, jusqu’alors coordinateur général des affaires présidentielles, a été limogé moins de deux ans après avoir pris ses fonctions au palais du Bord de mer. Noureddin Bongo Valentin avait alors la mainmise sur toutes les affaires présidentielles. Mais le gouvernement a décidé « de le remettre à la disposition de son administration d’origine ». Dans une lettre d’adieu au palais, le fils Bongo s’est félicité de ses discussions avec le FMI, de sa politique concernant la dette intérieure ou encore d’avoir lancé plusieurs gros projets d’infrastructure. Le gouvernement précise que la décision a été prise par les deux parties, assurant que les liens entre le président et son fils n’ont pas changé.
Mise en scène ou discorde au sein du palais ?
Noureddin Bongo Valentin estime d’ailleurs que « ce n’est pas la fin de l’histoire mais le début d’un nouveau chapitre ». Pressenti pour prendre la succession de son père, le fils Bongo peut-il avoir été limogé pour mieux revenir en 2023 ? L’opposant Alexandre Barro Chambrier parle d’« une mise en scène grotesque d’un personnage qu’on nomme aujourd’hui, que demain on enlève, qu’après-demain on va renommer. Ce sont des manœuvres sordides, suspectes, qui font peser de gros risques sur la démocratie ». Un observateur de la vie politique gabonaise estime, sous couvert d’anonymat, qu’en éloignant Noureddin Bongo Valentin, Ali Bongo a surtout « cherché à protéger son fils » à l’aube d’un scrutin qui s’annonce mouvementé. Soutenu par sa mère, Sylvia Bongo Ondimba, Noureddin est bien décidé à se présenter lors de la présidentielle. Reste à savoir si Ali Bongo est prêt à laisser son fauteuil à son dauphin naturel.
D’autres sources sont plus sceptiques quant à cet épisode politiques. Elles nous assurent que le palais est en proie à de véritables querelles familiales. La Première dame aurait perdu de son influence auprès d’Ali Bongo. « En résumé, le président lui a demandé de choisir entre lui et leur fils en vue de 2023 », affirme un proche du palais du Bord de mer. Notre source nous confie par ailleurs que Noureddin Bongo Valentin a déjà été assigné à résidence par son père pendant une semaine. Une mise en garde musclée : le président reprocherait à son fils d’être trop impatient et lui aurait demandé de se préparer pour 2030, et de faire une croix sur 2023. De quoi faire regretter à Ali Bongo d’avoir donné les clés du palais du Bord de mer à Noureddin Bongo Valentin ? En le nommant coordinateur général des affaires présidentielles, Ali Bongo a quasiment donné les pleins pouvoirs à son fils, qui avait donc la mainmise sur les finances mais également sur la stratégie politique nationale.
2023 en ligne de mire ?
Que va faire, désormais, Noureddin Bongo Valentin ? S’il a été remis à la disposition de son administration d’origine, il n’est pas certain que l’ex-coordinateur général des affaires présidentielles retrouve sa vie précédente. Des rumeurs l’envoient déjà à un nouveau poste, celui de haut-commissaire de la République, une fonction qui vient juste d’être créé et dont on ne connaît pas encore le nom du candidat. L’insistance du gouvernement à indiquer que Noureddin Bongo Valentin n’a pas été licencié et qu’il s’agit d’une simple suppression du poste de coordinateur général des affaires présidentielles permet de rendre cette thèse crédible. Pour des proches de l’opposition, le fils Bongo pourrait également être tenu éloigné des affaires politiques avant d’être rappelé, dans plusieurs mois, par son père. Après voir douché les espoirs de candidature de son fils pour 2023, Ali Bongo compterait encore sur lui.
En tant que coordinateur, à la différence d’un chef de cabinet, Noureddin Bongo Valentin rendait publiques ses actions et se déplaçait beaucoup sur le terrain. Or, avec une santé fragile, Ali Bongo effectue des apparitions publiques au compte-gouttes. Son fils lui a-t-il fait de l’ombre ? Selon des sources proches du palais présidentiel, Ali Bongo a pris la décision d’être candidat à sa propre succession en 2023. Ces mêmes sources estiment que Noureddin Bongo Valentin a finalement fait le deuil de 2023 et qu’il pourrait prendre les rênes du pays au cours du prochain mandat d’Ali Bongo. Le président aurait donc toujours confiance en son fils, qui connaît tous les rouages du palais mais a également contribué à remettre en ordre de marche le Parti démocratique gabonais (PDG), la formation au pouvoir. D’ailleurs, Noureddin Bongo Valentin est toujours le conseiller stratégique de son père, un poste auquel il a été nommé le 10 septembre. Ali Bongo et son entourage préparent-ils déjà activement la campagne, en tentant de travailler en duo ? Le 13 septembre dernier, le président gabonais tweetait une photo de lui et son fils avec un commentaire énigmatique : « Le travail continue ! »
Le travail continue !
pic.twitter.com/Z0WAgfxu0V
— Ali Bongo Ondimba (@PresidentABO) September 13, 2021