Les Emirats arabes unis ont promis de verser 20 des 30 millions d’euros manquants au G5 Sahel. Le pays du Golfe dépense sans compter pour être présent économiquement et politiquement en Afrique.
C’était le 13 décembre 2017. Organisé en France par Emmanuel Macron, un forum sur la sécurité avait permis de mobiliser des fonds pour le G5 Sahel. La sécurité dans la bande sahélo-saharienne s’était alors dégradée et les pays composant le G5 Sahel manquaient considérablement de fonds. Le président français s’était alors transformé en VRP pour tenter de trouver des fonds.
Parmi ses cibles, le Cheikh Mohammed Bin Zayed Al Nahyan, alias « MBZ », prince héritier d’Abou Dhabi et vice-commandant suprême des Forces armées émiraties. Ce dernier avait fait sensation à Paris en s’engageant à verser 30 millions d’euros au G5 Sahel.
Mais après la promesse, les fonds promis par le prince héritier ont été attendus longtemps. Très longtemps. Seuls 10 millions d’euros ont en effet atterri dans les caisses du G5 Sahel. Il a alors fallu relancer MBZ, qui a fini par promettre de décaisser les 20 millions restants rapidement.
Une promesse qui prend beaucoup de temps
Présent à N’Djaména les 15 et 16 février derniers, lors d’un sommet du G5 Sahel, le Cheikh Shakhbut bin Nahyan bin Mubarak al-Nahyan, ministre de la Coopération internationale des Emirats arabes unis, a réaffirmé le soutien financier de MBZ à l’institution présidée par Idriss Déby. Il a promis que les 20 millions manquants seraient décaissés avant la fin de l’été prochain. Un décaissement qui a tardé, les Emirats n’ayant que peu goûté ne pas être consultés pour l’achat de camions avec les premiers 10 millions d’euros versés.
Le pays du Golfe tarde cependant à honorer sa promesse. Les 20 millions étaient attendus ces derniers mois, mais le G5 Sahel n’en a jamais vu la couleur. Les chefs d’Etat africains commencent à ne plus y croire, eux qui avaient déjà longtemps attendu une aide de 100 millions d’euros de l’Arabie saoudite, avant de s’apercevoir que celle-ci n’arriverait jamais… Emmanuel Macron devrait rencontrer MBZ le mois prochain et l’inciter à accélérer le décaissement de la somme promise.
Investissements économiques et politiques
Il en va aujourd’hui de la crédibilité des Emirats arabes unis. La guerre froide entre le Qatar et Abu Dhabi avait incités les EAU à s’implanter un peu plus en Afrique. Là où Doha proposait d’aider militairement le Mali fin 2018, les Emirats avaient œuvré pour ouvrir une base au Niger. Mais entre les différents pays du Golfe, la situation s’est apaisée, et Abu Dhabi n’a peut-être plus autant besoin de courir après la montre. Déjà empêtrés dans le dossier libyen, les Emirats, qui avaient promis de débourser 1 milliard de dollars en soutien au Conseil national de transition.
Les autorités des Emirats arabes unis se sont tournées vers l’Afrique après la crise pétrolière. Le pays du Golfe, qui tire la majorité de ses revenus des hydrocarbures, a mis les moyens. Car à côté des Etats-Unis, de la Russie et de la Chine, les EAU ont encore beaucoup de chemin à parcourir. Economiquement d’abord, le pays du Golfe investit massivement, notamment dans la Corne de l’Afrique, dans les infrastructures depuis plus de dix ans. Politiquement, avant le Sahel, les Emirats se sont lancés sur le très instable théâtre libyen et au Soudan. Des régions instables dans lesquels MBZ espère avoir une influence politique. Mais est-ce vraiment une bonne nouvelle ?