Le Congo tente de panser les plaies de Congo Airways. La compagnie aérienne est en mauvaise posture. Mais sur le continent, elle est loin d’être la seule…
Le ministre congolais des Transports, Chérubin Okende, est certain que la compagnie aérienne Congo Airways est confrontée à « une faillite qui ne dit pas son nom ». Ce 9 septembre, il a présenté en conseil des ministres un rapport dans lequel il fustige notamment les « mauvais choix de modèle économique », la « gestion non transparente » de la compagnie ou encore des « structures tarifaires inadéquates ».
Selon Jeune Afrique, le ministre congolais propose d’adopter des « mesures conjoncturelles » de soutien à la compagnie et de débloquer des aides, pour un moment de plus de 50 millions de dollars, dont la moitié pour régler le solde d’un Embraer 190 neuf bloqué au Brésil car non payé par la compagnie.
Selon Africa Intelligence, le patron (par intérim) de Congo Airways, Pascal Kasongo, s’est en attendant lancé dans une recherche d’avions de seconde main. La note non réglée à Embraer oblige, ajoute le journal, la compagnie à se tourner vers des appareils en location.
Si Congo Airways semble être dans une situation critique, elle n’est pas la seule en Afrique. Qu’est-ce qui explique que tant d’entreprises du secteur aérien, sur le continent, soient si mal en point ?
Ethiopian Airlines, l’exception qui confirme la règle ?
En 2018, la presse s’étonnait qu’une seule compagnie africaine soit bénéficiaire. Il s’agissait alors d’Ethiopian Airlines. La seule à réussir dans un contexte difficile car, selon les spécialistes, étant une compagnie privée. Est-ce cela le secret de la réussite ?
Stacy Ndlovu, auteure du livre « African Liberty », déplore les mauvaises stratégies des États africains. Sous couvert de vouloir protéger leurs compagnies publiques nationales, souvent très mal gérées et déficitaires, les pays tentent de verrouiller leur ciel aérien.
La journaliste raconte comment la compagnie low-cost tanzanienne fastjet a dû attendre trois ans pour se lancer au Zimbabwe. Des blocages de la part des États qui pourraient se comprendre si leurs fleurons étaient menacés et performants. Or, on en est loin. A l’exception de Kenya Airways, South African Airways ou encore Ethiopian Airlines, on n’a que trop peu d’exemples de réussites en termes de compagnies aériennes. Et encore, les deux premières perdent de l’argent.
Si la journaliste estime que le low-cost pourrait sauver le secteur en Afrique, il faut d’abord revenir en arrière pour se rendre compte que le continent part de loin. Après les Indépendances, Paris a tout fait pour conserver une certaine hégémonie sur le continent, via Air France et Air Afrique. Depuis la faillite de cette dernière, des compagnies africaines ont tenté de se créer, mais difficile de concurrencer les autres sociétés internationales, notamment chinoises ou turques.
Des compagnies sous perfusion
Et ceux qui attendent un ciel aérien libéralisé peuvent être patients. Depuis 1988 et l’accord de Yamoussoukro pour libérer le ciel africain, rien ou presque n’a avancé.
La politique des États africains pour bloquer les concurrents n’aide pas. La patronne de l’Association des compagnies aériennes africaines (AFRAA), Elijah Chingosho, demandait en 2017 : « Comment pouvons-nous libéraliser les compagnies aériennes alors que nous les surtaxons ? »
A l’inverse, les gouvernements préfèrent injecter des sommes folles dans leurs compagnies, les tenant ainsi sous perfusion, plutôt que d’entamer des réformes structurelles. Certaines compagnies survivent avec des fonds étatiques, mais risquent de disparaître tant leur politique économique à court terme est vouée à l’échec. Ce n’est pas la Tunisie qui dira, avec Tunisair, le contraire.
Quant au Congo, malgré l’échec de Congo Airways, il se dit prêt à se lancer dans un nouveau défi, avec la création, en partenariat avec Ethiopian Airlines d’une nouvelle compagnie, Air Congo. Le ministre des Transports voudrait accélérer la création de cette société. Mais que fera-t-il de Congo Airways ? La compagnie congolaise s’ajoutera-t-elle à la longue liste des compagnies ayant fait faillite en Afrique ?