Le président du Niger a affirmé avoir libéré plusieurs chef terroristes ces trois derniers mois et dialoguer avec eux. Une solution pour arriver à des accords de paix ?
Ce vendredi, le président nigérien Mohamed Bazoum annonçait qu’on lui avait « conseillé de libérer des prisonniers » neuf chefs terroristes. Le chef de l’Etat les a ensuite « reçus au palais de la présidence » dans le but d’entamer des négociations de paix. Qui a conseillé à Bazoum de libérer ces terroristes jusqu’ici détenus dans les prisons de Kollo et de Koutoukalé ? Rien ne filtre pour le moment.
Mais ce que l’on peut comprendre du discours du chef de l’Etat, c’est une certaine impuissance. « Je ne ménage aucun moyen. (…) Je me débrouille comme je peux », a simplement affirmé le président du Niger, qui subit la situation.
Quoi qu’il en soit, ces libérations sont des messages forts : depuis le début des attaques terroristes de 1995 au Niger, « ces libérations sont les premières du genre publiquement divulguées dans le cadre de la recherche et la restauration de la paix », affirme la présidence.
Au Niger, mais également au Mali ou au Burkina Faso, les autorités envisagent depuis plusieurs mois désormais ce genre d’opération. Une partie des populations estime qu’il faut entamer un dialogue avec les différentes organisations terroristes pour envisager des accords de paix. Mais les puissances occidentales, parmi lesquelles la France, s’y sont régulièrement opposées.
Bazoum, de son côté, a agi plutôt discrètement. En effet, on apprend que les libérations en question ont eu lieu lors des « trois derniers mois ». Parmi les libérés, « des membres de mouvements dont Boko Haram », alors que d’autres groupes, comme l’État islamique en Afrique de l’Ouest (Iswap) et al-Qaïda continuent de semer la terreur un peu partout.
Dialoguer et poursuivre les opérations militaires
Le président nigérien assume sa position. Il veut, explique-t-il, comprendre ses jeunes qui se laissent enrôler. « Depuis que je suis venu à la tête de l’État, je me suis dit : ‘Ces jeunes gens là qui sont dans le terrorisme qu’est-ce qu’ils veulent ?’. J’ai décidé de les aborder, j’ai cherché le parent biologique de chacun d’entre eux, explique-t-il. Je leur ai envoyé des émissaires ».
Un dialogue à la source donc. Mais Mohamed Bazoum accompagne ce dialogue d’opérations militaires, qui se poursuivent au Niger : les soldats continuent d’agir « en permanence », assure-t-il.
Pour International Crisis Group, le dialogue avec les terroristes aurait dû être engagé depuis longtemps. « La stratégie qui privilégie une option militaire disproportionnée à la frontière entre le Niger et le Mali fait peser un risque sur la région : celui de créer un nouveau foyer d’insurrection », constate le think tank.
En juin 2018, International Crisis Group estimé que, pour éviter qu’un nouveau foyer d’insurrection se développe au Sahel, « le gouvernement nigérien et ses partenaires occidentaux devraient sortir du cadre restrictif de la lutte antiterroriste et subordonner l’action militaire à une approche plus politique, y compris en engageant un dialogue avec les insurgés de toute obédience ».
Les initiatives de dialogue, concluait l’organisation, « apparaissent comme la seule piste raisonnable pour limiter l’extension des insurrections jihadistes ». Tout en ajoutant que « ces initiatives n’excluent pas le recours à l’outil militaire ».