Dans la matinée de mardi, le président du Mali Assimi Goïta a échappé de justesse à une attaque au couteau. Une première depuis la prise de pouvoir par Goïta.
A qui profite le crime ? Mardi matin, en pleine fête de Tabaski, l’Aïd al-Adhâ, le président malien, Assimi Goïta, a été attaqué par un homme que l’on décrit comme « un enseignant », qui était armé d’un couteau. L’attaque a eu lieu à la fin de la prière de l’Aïd, dans une mosquée. Pendant que les fidèles se dirigeaient vers la salle extérieure de la mosquée Faisal de Bamako, l’assaillant s’est approché d’Assimi Goïta. Ce dernier était vêtu en bleu et entouré de plusieurs hauts responsables qui avaient prié à ses côtés quelques minutes plus tôt.
La présence de la garde présidentielle a empêché le pire. Trois membres de la garde rapprochée du président malien se trouvaient dans la foule et ont appréhendé l’homme avant qu’il ne passe à l’acte. S’en est suivie une panique générale sur les marches de la mosquée, où une personne a été légèrement blessée. Dans la foulée, un membre des forces spéciales a été arrêté par erreur avant d’être immédiatement relâché.
Quelques minutes plus tard, Assimi Goïta s’est adressé à la presse qui se à l’extérieur de la mosquée. Il a tenu à « informer le peuple malien que rien ne m’est arrivé. Je suis sain et sauf ». Avant de poursuivre, de façon presque sereine : « Il est normal que certains tentent de poser des actes pour déstabiliser la transition. Il y aura toujours des mécontents qui essayent de nous mettre des bâtons dans les roues ».
🇲🇱 Il vient d'échapper à une tentative d'assassinat à l'arme blanche.
C'était durant la prière musulmane de l'Aïd al-Adha, à la Grande mosquée de Bamako.
Le président malien de la transition, le colonel Assimi Goïta est sain et sauf.
Il le fait savoir à la télévision d'état. pic.twitter.com/71MR4htavK— Le journal Afrique (@JTAtv5monde) July 20, 2021
Une tentative d’assassinat qui n’arrange personne
« Déstabiliser », c’est le cas de le dire. Car à la suite du coup d’Etat qui a amené Goïta à la tête de l’exécutif malien, un gouvernement largement inclusif a été mis en place. La situation politique est relativement stable, certes. Néanmoins, la situation diplomatique et sécuritaire est au plus bas au Mali, et Goïta n’a toujours pas de vice-président.
Ainsi donc, la presse française, meilleure ennemie de Goïta et de sa junte, s’est empressée de mettre en relief la menace terroriste au Mali. Mais cette tentative de meurtre qui a visé Goïta a surtout été symbolique : avant d’être le président malien, une figure d’unité nationale. Depuis la chute d’IBK, Goïta a œuvré aux côtés de l’ancien président Bah N’Daw afin de calmer les tensions entre les Maliens armés et politisés, en tentant de n’exclure personne. L’assassinat de Goïta n’arrangerait donc semble-t-il personne au Mali. Pas même les groupes armés terroristes (GAT).
Alors qui a bien pu tenter d’assassiner Goïta ? Au niveau politique, à l’exception de deux petits partis, non connus pour leur violence, le pays entier s’accorde sur le respect de la période de transition. Même l’extrême gauche, dont le chef Choguel Maïga est Premier ministre, et l’extrême droite, dont le guide Mahmoud Dicko est aussi représenté dans le gouvernement, n’avaient pas intérêt à perpétrer un tel acte. Et même les insurgés les plus violents, à savoir le Front populaire de l’Azawad (FPA), sont très proches de la junte, qui leur a épargné une interminable guerre civile. Goïta, dans sa volonté d’unir, leur a même permis d’être présents au gouvernement pour la première fois dans l’histoire du Mali.
Ataque en Mali, intentan asesinar al presidente interino
Dos personas intentaron apuñalar al presidente interino de Malí, el coronel Assimi Goita, durante la celebración del ritual musulmán del Eid al Adha, o fiesta del Sacrificio, en la … – https://t.co/8xWu6cUFIa pic.twitter.com/TvnAKUbLxZ— Rumbo Nuevo (@rumbonuevo) July 21, 2021
L’étranger et l’armée eux aussi accusés
Dans l’entourage de Goïta, et plus généralement au Mali, on en vient à penser que celui qui aurait tenté d’assassiner le président ne se trouve pas au Mali. Depuis hier, la presse malienne, en tout cas, s’en donne à cœur joie. Les journaux lorgnent du côté des pays voisins, mettant sur leur une des chefs d’Etat de la Cedeao qui avaient condamné le coup d’Etat de Goïta. La presse malienne va même jusqu’à accuser directement la France. Une hypothèse beaucoup plus populaire, et populiste, sur laquelle les internautes semblent tomber d’accord en grande majorité. De son côté, Paris a condamné l’agression et appelé à la « sérénité pour la poursuite de la transition jusqu’à son terme ».
En tout cas, rien ne filtre du côté des enquêteurs. L’assaillant appréhendé ne tardera pas à parler. L’hypothèse d’un acte solitaire est également plausible. Une dernière piste est étudiée par les observateurs : trois figures nationales pourraient en vouloir à Assimi Goïta : l’ancien président Bah N’Daw et son Premier ministre Moctar Ouane, tous deux en détention depuis le dernier coup d’Etat, mais également le fils d’Ibrahim Boubacar Keïta, Karim Keïta, qui a été visé par un mandat d’arrêt international. Les opposants d’Assimi Goïta, eux, accusent l’armée d’avoir orchestré l’attentat. Une chose est sûre : la communication des militaires semble, cette fois, plutôt transparente et l’armée devrait, sans aucun doute, livrer sous peu les éléments dont elle dispose.