Suite à une demande expresse de la France, l’OTAN rejoindra les forces européennes Takuba dans la « lutte antiterroriste » au Mali. A la clé, la vente d’armes et un potentiel déploiement terrestre américain au Mali.
Depuis l’annonce du retrait progressif des forces françaises Barkhane, l’énigmatique « renforcement de Takuba » fait la une des journaux. Et le 9 juin dernier, soit cinq jours avant le Sommet de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), à Bruxelles, la France avait proposé un point important à l’ordre du jour.
En effet, le général français Philippe Lavigne a demandé à l’agence NSPA, filiale logistique de l’OTAN, de prendre en charge l’armement de Takuba. La NSPA a déclaré son engagement, via un mémorandum signé par son directeur général, Peter Dohmen, et par le général Laurent Marboeuf, du ministère français de la Défense.
Premiers soldats américains au Mali
C’est la première fois que la France demande une aide logistique à l’OTAN. Et le contingent de 500 soldats que la NSPA déploiera « avant la fin de 2021 » accueillera les premiers soldats américains au Mali depuis le début de l’opération antiterroriste Serval, à laquelle avait succédé Barkhane. Jusqu’à maintenant, seuls quelques alliés européens de la France ont rejoint l’offensive au Sahel.
C’est donc un pas très important, qui pourrait signifier le transfert de l’intervention militaire française vers l’OTAN. Cela pourrait également impliquer directement les Etats-Unis, qui s’engageraient donc au Sahel. Un engagement qui va au-delà du renseignement et de la surveillance aérienne et satellite.
L’OTAN au Mali, une étape dangereuse
Une potentielle intervention de l’OTAN au Mali pourrait expliquer l’hésitation de la Russie. En effet, Moscou n’a pas pris acte des revendications populaires au Mali, alors qu’une intervention militaire russe était plébiscitée en lieu et place de Barkhane. Et, bien que l’Algérie ait été beaucoup plus franche sur ce plan, aucun soutien militaire étranger concret n’a été accordé au nouveau pouvoir malien.
Bien au contraire, le président malien Assimi Goïta, comme son Premier ministre Choguel Maïga, ont accompli toutes les étapes nécessaires pour apaiser la France et l’Europe. Si une offensive de l’OTAN au Mali peut paraître surréaliste, elle n’en est pas moins probable. « La coopération entre Takuba et l’OTAN est une preuve de confiance mutuelle », estime le général Laurent Marboeuf. Avant de poursuivre : « C’est la première fois que la France sollicite un soutien extérieur. C’est aussi la première fois que la NSPA apporte son soutien à une coalition militaire qui n’est pas sponsorisée par l’OTAN. Nous ne doutons pas qu’il s’agit d’un projet gagnant ».
Un marché de l’armement qui attire les convoitises
La task-force Takuba, qui accueillera, dans sa prochaine version, quatorze pays européens et le Royaume-Uni, serait-elle sous contrôle des Etats-Unis ? Selon un dossier réalisé par le service des Etudes-Défense de l’état-major italien, « le soutien de l’OTAN à Takuba s’inscrit dans un nouveau cadre stratégique, politique et opérationnel dans le Sahel ». Le dossier date du 16 juin, soit deux jours après le sommet de l’OTAN. Il a été publié le lendemain de la signature du mémorandum entre la France et la NSPA.
Outre le maintien de la paix, cette opération a également un autre objectif : le déploiement militaire au Mali représente en effet un marché de l’armement qui vaut potentiellement 20 milliards de dollars, que la France abandonne délibérément. Raison qui pourrait expliquer la poussée atlantiste dans le bourbier malien…