Le chef d’état-major de l’armée algérienne est actuellement en Russie. Le pays du Maghreb voit en Moscou un allié de poids dans plusieurs dossiers chauds.
Après plusieurs années d’effacement, l’Algérie a fait son retour sur la scène diplomatique depuis l’aggravation de la crise libyenne il y a maintenant un an et demi. Le retard semble difficile à combler, tant le pays a, pendant deux décennies, totalement mis de côté sa diplomatie continentale. Mais depuis l’élection d’Abdelmadjid Tebboune à la tête du pays, l’Algérie retrouve des couleurs sur la scène diplomatique. Et la crise sanitaire a même provoqué un regain de ce côté-là avec une « diplomatie du vaccin » offensive.
Du côté militaire, l’Algérie avance également ses pions, non sans une certaine maîtrise. Il est loin le temps du général de corps d’Armée Ahmed Gaïd Salah, qui était également vice-ministre de la Défense nationale et chef d’état-major de l’Armée nationale, décédé en décembre 2019. Proche des Emirats arabes unis, Salah avait tenté de « vendre » l’armée algérienne à Mohammed ben Zayed Al Nahyane, alias MBZ. Sans véritablement réussir son coup.
Et si la solution se trouvait du côté de Moscou ? En tout cas, le chef d’état-major actuel de l’armée algérienne, s’est rendu pour un séjour de travail en Russie. Saïd Chengriha est arrivé à Moscou ce lundi 21 juin, « sur invitation de Monsieur le Général d’Armée Choïgou Sergueï Koujouguévitch, ministre de la Défense de la Fédération de Russie », indique le ministère algérien de la Défense. Selon Jeune Afrique, le chef d’état-major de l’armée est, avant cela, passé à Paris. Au menu, des discussions concernant le Sahel. Chengriha aurait ainsi rencontré son homologue français, le général Thierry Burkhard.
Le Sahara occidental et la Libye, deux points de convergence
Une visite de courtoisie principalement. Rien à voir avec le voyage de Saïd Chengriha, qui revêt un enjeu plus stratégique : le chef d’état-major algérien participe, depuis hier, à la conférence de Moscou sur la sécurité internationale. Selon le magazine africain, une délégation de la marine algérienne participe également à l’International Maritime Defence Show (IMDS), à Saint-Pétersbourg.
La Russie et l’Algérie ont des relations commerciales très fortes en termes d’armement : Moscou est en effet le fournisseur numéro 1 d’armement à l’Algérie. Un marché qui s’est fortement développé depuis cinq ans.
Mais pour le chef d’état-major de l’armée Saïd Chengriha, il s’agissait aussi de faire de la diplomatie. Car Moscou est un allié de poids, notamment dans le dossier sahraoui : le 10 juin dernier, le ministère russe des Affaires étrangères a indiqué qu’il voyait « la décision de l’administration américaine (de reconnaître la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, ndlr) comme portant atteinte au cadre juridique international généralement reconnu pour le règlement du dossier du Sahara occidental, qui prévoit la détermination du statut final de ce territoire par le biais d’un référendum sous les auspices de l’ONU ».
Autre dossier dans lequel l’appui de la Russie est important : la Libye. Alors que se déroule actuellement la conférence Berlin 2 sur la transition en Libye, Moscou est un acteur important de ce dossier. L’an dernier, le ministre algérien des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, affirmait qu’il existe « une converge de vues entre l’Algérie et la Russie autour de la crise libyenne ». Nul doute qu’il a largement été question de la Libye entre les autorités russes et le chef d’état-major de l’armée algérienne, qui peut également faire de l’Algérie un allié de poids dans la diplomatie militaire mondiale : depuis un peu plus de six mois, le pays s’autorise un déploiement de son armée à l’étranger. Un droit constitutionnel qui, sous Abdelaziz Bouteflika, n’existait pas.