Le ministre finlandais des Affaires Etrangères, Pekka Haavisto, a dénoncé une déclaration du Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed. Ce dernier aurait annoncé son intention « d’exterminer les Tigréens pendant 100 ans ».
C’est une déclaration dangereuse qu’a fait le ministre finlandais des Affaires Etrangères, Pekka Haavisto. Selon lui, durant son mandat en tant qu’envoyé spécial de l’Union européenne (UE) en Ethiopie, il se serait entretenu avec le Premier ministre Abiy Ahmed et plusieurs ministres éthiopiens. Durant cette réunion, à huis clos, les membres du gouvernement éthiopien auraient menacé « d’exterminer les Tigréens ».
La fameuse réunion aurait eu lieu en février. Et la dénonciation des propos tenus alors pourrait menacer la carrière du diplomate finlandais. Il s’agit d’une brèche inédite des normes diplomatiques. Toutefois, c’est une déclaration choquante, qui lève le voile sur l’objectif du massacre au Tigré. En février, Pekka Haavisto avait déclaré qu’il a eu « deux jours intensifs de réunions » avec Abiy Ahmed et d’autres « ministres clés ». Le déploiement de l’envoyé spécial était une dernière tentative de l’UE de convaincre l’Etat éthiopien de reconsidérer l’engagement militaire au Tigré.
Depuis trois semaines, l’ONU a multiplié les alertes sur l’évolution de la guerre du Tigré en génocide. Des rapports sur le terrain démontrent que les civils massacrés sont exclusivement tigréens. Depuis le 25 mai, les réfugiés de l’ethnie tigré sont systématiquement renvoyés des camps. Voire transportés vers le désert, où actuellement au moins 350 000 personnes meurent de faim. L’utilisation de la famine comme arme de guerre s’additionne à une longue liste de crimes dont le gouvernement éthiopien et ses alliés sont accusés aujourd’hui. En effet, avec ses alliés de l’Erythrée, et plus récemment de la Somalie, les légions d’Amhara auraient commis des atrocités.
Détruire les Tigréens, les anéantir pendant 100 ans, les exterminer
La communauté internationale a déjà relevé des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité dans le Nord éthiopien. Depuis des mois, les rapports se sont multipliés sur les viols, la traite des êtres humains, les exécutions sommaires, le pillage etc.
Cependant, le « conflit » a pris une tournure dramatique. Depuis que les troupes d’Abiy Ahmed visent exclusivement les civils. Et surtout, depuis que ces derniers sont choisis sur la base de l’ethnie. Il s’agit d’un génocide en cours, qui a le potentiel d’être le plus massif du XXIe siècle.
Avec les déclarations de Pekka Haavisto, l’Union européenne a adopté une position très déterminée. Il est évident que la dénonciation intervient à deux jours des élections éthiopiennes. Donc, l’enjeu politique est très clair. Néanmoins, au vu de la nonchalance de l’Etat éthiopien devant les sanctions et les avertissements précédents, il n’est pas sûr que les choses changeraient. De plus, Abiy Ahmed est pratiquement seul en lice pour les élections.
« Lorsque j’ai rencontré les dirigeants éthiopiens en février, ils ont vraiment tenu ce genre de langage », a déclaré Haavisto. Avant de continuer : « Ils ont dit qu’ils vont détruire les Tigréens, les anéantir pendant 100 ans, les exterminer, et ainsi de suite. Pour nous, cela ressemble à du nettoyage ethnique. C’est un acte très grave ».
Enfin, Pekka Haavisto a fini son témoignage en disant : « Je pense que c’est très évident, que nous (l’UE) devons réagir ». Contacté par l’AP après cette intervention choc, en vidéoconférence devant le parlement européen, Haavisto a déclaré ne pas avoir d’autres commentaires sur le sujet. L’Union européenne prendra-t-elle acte des témoignages de son envoyé spécial ? Dossier à suivre.
When I asked the #EU Envoy @Haavisto about #AbiyAhmedAli + #IsaiasAfewerki committing War Crimes in #Tigray he replied- "..when I met the #Ethiopian Leadership in February they used this kind of language, that they are going to destroy the Tigrayans, they are going to wipe out.." pic.twitter.com/mrdtmEHCaS
— Mick Wallace (@wallacemick) June 17, 2021