Des manifestations ont éclaté aujourd’hui à khartoum, la capitale soudanaise. Après les pressions de l’Opep et la hausse aigüe de l’inflation, le Soudan a entièrement libéralisé le prix des carburants.
Malgré l’aide française à hauteur de 5 milliards de dollars, le Soudan n’est pas au bout de ses peines. L’économie souffre tellement que Khartoum avait décidé d’enfreindre ses quotas de production de pétrole. Un avertissement de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) s’en est suivi. Puis, et surtout à partir du Sommet de Paris, la monnaie nationale, la livre soudanaise, a fortement baissé. Tant et si bien que le Soudan, sous la pression du Fonds Monétaire International (FMI), a dû libéraliser complétement le prix des carburants à la pompe.
Face à la décision hâtive et sans avertissement, la rue proteste depuis des jours. Des manifestations éparpillées ont démarré partout dans la capitale Khartoum aujourd’hui. Des centaines de personnes mettent des barricades sur les routes principales et brûlent des pneus. Parmi eux, certains exigent le retrait de la réforme du FMI, d’autres souhaitent la chute du gouvernement de Abdel Fattah Abdelrahmane al-Burhan.
Tout a un prix
Tout cela a commencé par une décision inattendue du président français Emmanuel Macron. A la veille du Sommet de Paris, Macron a organisé la conférence internationale sur la transition démocratique au Soudan. Il a annoncé l’effacement de 5 milliards de dollars de la dette soudanaise de concert avec l’Allemagne, l’UA, l’ONU et le FMI. Cette joyeuse compagnie avait aussi facilité un accord de rééchelonnement des 36 milliards restants de la dette souveraine du Soudan. Une entente conclue en un temps record avec le FMI.
Or, le FMI a exigé beaucoup de mesures douloureuses du Soudan. La longue liste de réformes a fait grimper l’inflation annuelle à 363 %. En effet, l’axe financier de cette réforme a dévalué la livre à des taux insupportables. Afin de juguler ce contexte, le Soudan a augmenté sa production de pétrole. Or, les responsables de l’Opep ont exigé « une compensation immédiate des volumes surproduits ». Rappelons que la surproduction en question atteint les 120 000 barils par jour, contre celle des Etats non-membres qui en ont 180 000. Le Soudan a été le deuxième surproducteur de l’Opep.
Face à la menace de l’Opep, le Soudan a baissé sa production pétrolière excessive. Et afin de compenser le manque à gagner des recettes de l’Etat, le gouvernement a décidé de lever les subventions sur le carburant.
Un ras-le-bol général au Soudan
La décision, prise unilatéralement par ordre exécutif du ministère de l’Economie, a causé un tollé immédiat. La police a réprimé des attroupements, préventivement, depuis samedi. Ce qui a exacerbé les tensions après l’annonce de la libéralisation des prix du carburant.
Au début, les Soudanais se sont dirigés par milliers aux stations-service afin d’acheter le plus d’essence et de diesel avant que les prix ne grimpent à nouveau. Or, le prix avait déjà doublé au moment où la nouvelle a été annoncée par le gouvernement. En plus des produits de base, des médicaments et des tickets pour les moyens de transport publics dont le prix augmente depuis des semaines. C’est donc un ras-le-bol généralisé de la part des citoyens.
Selon plusieurs activistes, le budget de l’armée n’a pas souffert de la crise récente. Les salaires auraient été augmentés pour accompagner la hausse des prix. Cependant, même face à cette injustice, le ministre de l’Economie Gibril Ibrahim a déclaré que la libéralisation de l’économie soit seulement à ses débuts. « C’est le seul moyen pour remettre l’économie sur les rails », a-t-il déclaré.
Toutefois, le gouvernement a annoncé que des subventions directes seraient « en cours d’étude » pour les secteurs de l’agriculture, des transports et de l’électricité. Un communiqué, assez provocateur, estime aussi que « le Soudan reste le 6e pays le moins cher sur 42 pays africains ». Cela va sans dire que les 12 pays oubliés soient aussi moins chers que le Soudan. Et sans doute plus riches.
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