Alassane Ouattara a préféré reconduire Amadou Soumahoro à la présidence de l’Assemblée nationale ivoirienne plutôt que de nommer Adama Bictogo. Un choix qui s’appuie sur une distribution des rôles bien établie.
Voilà une semaine qu’Alassane Ouattara réfléchit au nom du successeur de Soumahoro à la présidence de l’Assemblée nationale. Après la victoire du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) lors des dernières élections législatives, le président de la République avait plusieurs nom de proches en tête pour prendre la place de chef du perchoir. Un enjeu de taille avec le retour du Front populaire ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo au Parlement et la percée du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA) d’Henri Konan-Bédié.
C’était le nom d’Adama Bictogo qui revenait le plus avec insistance ces derniers jours. Le secrétaire exécutif du parti avait assuré, la semaine dernière, qu’Alassane Ouattara « aura le dernier mot » sur le choix du président de l’Assemblée et que « la discipline du parti prévaudra, quel que soit son choix ». Il n’imaginait sans doute pas que le poste lui échapperait quelques jours plus tard.
La santé fragile d’Amadou Soumahoro
Car le président de la République a finalement opté pour le chef de l’Assemblée nationale sortant. C’est en effet Amadou Soumahoro qui a été reconduit, hier, à la présidence de l’Assemblée. Problème : Soumahoro a de nombreux soucis de santé. Et Mamadou Diawara, le doyen de l’Assemblée, s’est entretenu avec Alassane Ouattara pour lui toucher un mot à propos de la fragilité du chef du perchoir.
Des rumeurs courent actuellement sur une maladie qui toucherait le président de l’Assemblée nationale. En juillet dernier, Amadou Soumahoro avait dû être évacué en France, en pleine pandémie, pour se faire soigner. Un voyage en Turquie, en février dernier, avait également été évoqué. Soumahoro y aurait, là encore, reçu des soins. Au début de l’année, le président de l’Assemblée nationale avait même dû démentir des rumeurs annonçant sa mort.
Au journal La Croix, le politologue Sylvain N’Guessan déplore l’opacité autour des questions de santé des dirigeants politiques ivoiriens. « Ceux qui occupent les postes de responsabilités de l’exécutif ne respirent pas la grande forme. Chez nous, la santé est un sujet tabou, donc les politiciens ne communiquent pas dessus, jusqu’au moment où le pire arrive ». Une opacité qui avait plongé Alassane Ouattara dans une crise institutionnelle grave à la mort d’Amadou Gon Coulibaly, son Premier ministre, puisque le président n’avait ni Premier ministre ni président de l’Assemblée nationale à ses côtés.
Adama Bictogo, vice-président aux pouvoirs élargis
Alors pourquoi prendre à nouveau le risque de nommer une personnalité fragile à un poste clé ? Principalement pour des raisons de distribution régionale de postes. « Tchoumba » est en effet natif de Worodougou. Or, avec un Premier ministre, Patrick Achi, originaire du sud, et le décès d’Hamed Bakayoko, l’autre fils de Worodougou, la région du centre-ouest du pays attendait à nouveau un poste clé pour un dirigeant de son cru. Une déception pour Adama Bictogo.
Mais le directeur exécutif du RHDP a hérité d’un des onze postes de vice-président de l’Assemblée nationale. Et Alassane Ouattara a voulu que son allié devienne un des poids-lourds du Parlement. Il devrait donc agir dans l’ombre d’un Amadou Soumahoro amoindri. D’après Jeune Afrique, un accord a été passé entre Adama Bictogo et le président de l’Assemblée. Ce dernier « accordera d’importantes délégations de pouvoir à Bictogo », écrit le magazine. Un lot de consolation en attendant que le directeur exécutif du RHDP puisse accéder à un poste plus prestigieux.