Le ver est dans le fruit depuis le 17 mars 2017. Ce jour-là, la Confédération africaine de football élisait son nouvel empereur. Mais n’est pas Issa Hayatou qui veut : les règnes sont parfois de courte durée, et l’argent facile peut vite monter à la tête. D’abord porté aux nues par la Fédération internationale de football, Ahmad Ahmad est finalement tombé en disgrâce aussi vite qu’il était arrivé. Le sentiment d’impunité qui l’animait a été stoppé net le jour où Gianni Infantino, en roi des rois, a imposé à la CAF une mise sous tutelle en règle. Après avoir activement favorisé l’accession au pouvoir du Malgache, l’Italo-Suisse a décidé de se débarrasser manu militari d’un allié devenu encombrant, qui devrait désormais passer plus de temps devant les tribunaux que dans les stades.
« Tel un joueur d’awalé, Gianni Infantino a avancé petite à petit ses pions »
Tel un joueur d’awalé, Gianni Infantino a avancé petite à petit ses pions pour s’assurer un vote africain lors de la prochaine élection du président de la FIFA. L’Italo-Suisse avait le choix du roi : quatre candidats comptaient se hisser au plus haut poste de la CAF. Le Sénégalais Augustin Senghor et l’Ivoirien Jacques Anouma trop expérimentés, le Mauritanien Ahmed Yahya insipide et sans saveur, le patron de l’instance internationale a jeté son dévolu sur un novice : le Sud-Africain Patrice Motsepe. Dans la négociation, il a bien évidemment été question de gros sous : s’il promettait un soutien sans faille à Infantino, Motsepe serait propulsé président de la CAF et son club, le Mamelodi Sundowns FC, promis à une participation à la très lucrative Ligue africaine prévue par la FIFA.
« ‘Mouche du roi est roi’, dit un proverbe sud-africain »
« Mouche du roi est roi », dit un proverbe sud-africain. En s’attirant les faveurs d’Infantino, Patrice Motsepe savait qu’il gagnerait facilement sa couronne. Le président de la FIFA a œuvré en coulisse pendant tout le mois de février pour écarter la concurrence. Yahya dans la poche, Gianni Infantino n’a pas eu à beaucoup s’égosiller pour faire flancher les candidats sénégalais et ivoirien. Promis à des postes clé — respectivement vice-président et conseiller spécial du président de la CAF —, Senghor et Anouma ont accepté assez facilement la proposition « qu’ils ne pouvaient pas refuser », de la part de celui qui a agi comme un parrain sicilien. Une opération qui sonne comme un déni de démocratie. Qu’importe : Infantino voulait Motsepe, il l’a eu. Au détriment du football africain ? Certainement, car il n’est pas toujours facile de faire d’une mouche un éléphant, dit-on.