Après avoir œuvré pour l’indépendance du Soudan du Sud, les Etats-Unis regardent désormais de loin le pays s’enliser dans les violences. Un pays au bord de l’implosion…
C’est le dernier-né sur l’échiquier mondial. Le 9 juillet 2011, le Soudan du Sud obtient son indépendance à l’issue d’un référendum d’autodétermination. A la différence d’autres Etat s’étant autoproclamés indépendants, le Soudan du Sud est immédiatement reconnu par la communauté internationale et les Nations unies. Un statut acquis grâce à l’aide des Etats-Unis.
Le pays de l’Oncle Sam a notamment, dans les années 1980, soutenu l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS). Dès 2002, les Etats-Unis initient des négociations entre l’APLS et le gouvernement soudanais. Neuf ans plus tard, cela aboutira à la création du Soudan du Sud. Une façon pour la partie chrétienne de la population soudanaise de se libérer du joug d’Omar al-Bachir.
Une guerre civile qui n’en finit plus
Mais les espoirs placés dans le 193e Etat membre des Nations unies sont rapidement déçus… Avant l’indépendance, via USAID, l’Agence des Etats-Unis pour le développement international, l’Amérique avait participé à la création d’institutions à Rumbek, comme une banque centrale. A partir de 2011, les Américains gardent un œil attentif sur la situation au Soudan du Sud.
Mais de petit protégé des Etats-Unis, le pays devient rapidement un monstre incontrôlable. Moins de deux ans après l’indépendance, le Soudan du Sud est au bord de l’implosion. La faute à une guerre civile qui oppose l’armée sud-soudanaise à des groupes opposants, menés par des partisans de l’ancien vice-président Riek Machar.
« En 2011, une guerre éclate entre les deux groupes qui se partagent alors le pouvoir et ravive les tensions ethniques, explique l’ONG Médecins sans frontières. De 2013 à 2018, en dépit des initiatives de réconciliation, le conflit a forcé des millions de Sud-Soudanais à fuir à nouveau leurs foyers et aurait causé la mort de centaines de milliers de personnes ».
Le cuisant échec de Barack Obama
Après la tentative de George W. Bush de stabiliser la région dès 2005, Barack Obama se retrouve alors en observateur forcé du conflit. Le président américain nomme alors un envoyé spécial pour le Soudan du Sud. Mais Donald Booth ne parvient pas à réconcilier les différentes parties de ce conflit.
En 2021, alors qu’ils ont investi plusieurs milliards de dollars pour ramener la paix au Soudan, les Etats-Unis se rendent compte de leur échec : après des accords de cessez-le-feu en 2015, 2016 puis 2018, les violences continuent.
Aujourd’hui, l’Amérique semble se désintéresser du pays qu’elle a elle-même aidé à obtenir son indépendance. Dans une tribune publiée dans Le Monde, la chercheuse Clémence Pinaud écrit que « les Etats-Unis, leader de la communauté internationale dans le pays » ont laissé faire les massacres ethniques « tout en réduisant leur présence diplomatique ». La chercheuse évoque les « massacres génocidaires » et s’étonne que les Etats-Unis ne dénoncent pas ces derniers.
L’administration Biden n’y changera rien
L’arrivée de Joe Biden y changera-t-elle quelque chose ? Non, selon Clémence Pinaud, qui affirme qu’« il n’y a pas beaucoup d’espoir pour le Soudan du Sud », Washington préférant « un Etat génocidaire à un Etat failli ». Quant au nouveau président américain, il s’est entouré d’anciens collaborateurs de Barack Obama. Ce qui, pour la chercheuse, au vu de « leur soutien à des élections non démocratiques au Sud Soudan », laisse présager un mutisme et un attentisme américains à propos de la situation sur place.