Auditionné par l’Agence nationale des renseignements de RDC, François Beya est toujours privé de sa liberté. Son avenir reste, aujourd’hui, incertain.
C’est une arrestation qui a fait énormément de bruit. Le samedi 5 février, l’Agence nationale des renseignements (ANR) faisait arrêter François Beya, jusque là considéré comme l’influent « Monsieur renseignements » de Félix Tshisekedi, le président de République démocratique du Congo. Il avait alors fallu attendre pour connaître les raisons de l’arrestation de Beya : Kasongo Mwema, porte-parole de la présidence, affirmait alors que l’ANR disposait d’« indices suffisamment sérieux » soutenant une « menace à la sûreté nationale ».
Depuis, si une « guerre de palais » avait été évoquée, Beya étant un proche du clan Kabila, la question de la sûreté nationale est rapidement devenue le principal sujet concernant cette affaire. Des sources non officielles, proches de la présidence, assurent que « des enregistrements de complots mettent en cause des généraux de l’armée ». D’autres sources, citées par la presse, assurent qu’un « enregistrement compromettant » aurait circulé, dans lequel Beya s’en prenait ouvertement aux proches du président congolais.
Ces derniers jours, la presse congolaise s’est cependant penchée sur le cas Beya. Pour Exclusif RDC, le spécialiste du renseignement pourrait bien être relâché après son audition, en fin de semaine. Une info qui émane de la radio Top Congo, qui cite le patron de l’ANR. Sauf que Beya ne semble pas près de sortir de détention. Le Collectif Free François Beya Kasonga estime qu’il s’agit en réalité d’une « démarche qui sème volontairement la confusion ».
Effectivement, François Beya pourrait bien rester de longues semaines encore dans les locaux de l’ANR. Ses conditions de détention sont connues : Beya dispose d’un appartement entier et l’homme peut recevoir la visite de certains de ses proches, de son épouse à sa fille, en passant par son frère Constantin Tshiyombo, ainsi que son médecin.
Les amis haut placés de François Beya
Le dossier de Beya est sensible pour Kinshasa. Pendant sa longue carrière, François Beya a établi des réseaux solides, pas seulement dans le pays, mais également internationaux. Dans la sous-région, « Fantômas » entretient des rapports privilégiés avec ses confrères des renseignements, en Angola, au Gabon, au Congo-Brazzaville, au Rwanda… Il serait également connecté jusqu’aux palais présidentiels, où il a souvent été reçu dans le cadre de projets de coopération sécuritaire ou d’opérations conjointes.
Il avait suivi une formation auprès des services de renseignement israéliens (GSS), mais aussi à Langley, le berceau de la CIA aux Etats-Unis, pendant deux ans. « François Beya a aussi longtemps préservé une relation de confiance nouée sous Mobutu et renforcée durant les guerres du Congo, avec la diplomatie américaine et la CIA, ce dont il ne se cachait pas auprès de certains de ses homologues d’Afrique centrale », affirme Africa Intelligence.
« Ces derniers mois, il a rencontré à plusieurs reprises le patron de la DGSE, Bernard Emié », révèle même le journal. Beya a, également, des amis haut placés en France.
Un placement en résidence surveillée envisagé
Beya risque de rester détenu le temps que l’enquête se poursuive. « Les services de l’ANR s’activent à établir les ramifications internes et externes possibles ainsi que leurs conséquences sur la sûreté présente et future de l’Etat », résume Le Journal de Kinshasa.
Mais alors, d’où provient l’information concernant une possible libération de François Beya ? Selon un proche du dossier, un placement en résidence surveillée serait envisagé.
Quoi qu’il en soit, au-delà de la simple arrestation de Beya, c’est toute une opération qui s’est mise en place : une dizaine d’arrestations ont eu lieu rien que dans le cadre de ce dossier. Des interpellations qui concernent notamment des hauts gradés de la Garde républicaine ou des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC). Plusieurs civils sont également concernés, ainsi que les proches de Beya, dont certains ont déjà été interrogés.
Nul doute qu’après la perquisition qui a été menée dans les bureaux de Beya, situés au sein de l’hôtel Sultani, et après plusieurs jours d’audition, une décision sera prise quant à l’avenir de l’ex-conseiller de la présidence. Mais alors que l’enquête avance lentement, la libération pure et simple de l’ancien « Monsieur renseignements » de Félix Tshisekedi ne semble pas être aujourd’hui à l’ordre du jour.